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Réindustrialiser, mais comment ?

par Philippe Allienne
Publié le 24 septembre 2021 à 11:17

De quelle réindustrialisation parle donc la ministre en charge de l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher ? Elle l’avait dit à Lyon, au début de ce mois de septembre, et l’a répété lorsqu’elle est venue à Saint-Saulve pour visiter l’usine Ascoval : il s’agit de passer du « quoi qu’il en coûte » à une « politique industrielle d’avenir ». Cela passera, pour elle, par un travail sur les coûts de production, le financement des startups industrielles et la formation aux métiers de l’industrie. Elle n’oublie pas les secteurs d’avenir comme la production de batteries électriques ou la microélectronique. À la différence de l’Allemagne, de la Suisse ou de l’Italie, la France a raté le virage des machines-outils, explique la ministre. Alors, il lui faut réussir le virage de « l’industrie du futur » avec ses technologies de machines à commande numérique, la fabrication numérique, les robots et autres capteurs permettant de « gérer en temps réel la production et de réaliser de la maintenance productive ». Voilà, avec les relocalisations, les grandes lignes du plan « France 2030 » que veut le président Emmanuel Macron et tel qu’il l’a annoncé. Il s’agit en fait d’un nouveau plan d’investissement qui doit compléter le plan de relance pour 2021 et 2022. Mais concrètement, les contours demeurent flous. Dans les Hauts-de-France, que peut-on espérer ? Si les salariés d’Ascoval retrouvent le sourire après la reprise de leur usine par le sidérurgiste allemand Saarstahl, la région demeure marquée par la fermeture de Bridgestone, à Béthune, et de Maxam Tan à Mazingarbe. À Haubourdin, près de Lille, on connaît le sort de Cargill. Lorsqu’elle vient parler réindustrialisation et relocalisation, Madame Pannier-Runacher sait bien qu’il n’y aura plus de fabrication de pneumatiques dans la région. Le japonais Bridgestone a préféré la solution, précisément, de la délocalisation. À Douvrin, la fin de la Française de mécanique est annoncée pour 2030. On semble donc plutôt aller vers une poursuite de la désindustrialisation et non vers des projets de réindustrialisation ou de relocalisation. En fait, le gouvernement fait le pari d’une réindustrialisation liée à la transition énergétique et à la décarbonisation de l’industrie. Certes, mais les usines de batteries électriques annoncées dans les Hauts-de-France ne suffiront pas à répondre aux besoins en matière d’emploi. C’est au besoin réel en matière d’industrie qu’il faut s’intéresser. Pour l’heure, on parle plutôt de mutation de l’activité économique. C’est encore ce qui apparaît quand on considère les projets logistiques en cours de développement. Or, la logistique se fonde sur une logique d’importation. C’est l’inverse de la logique d’une implantation industrielle.