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Une occasion manquée pour le président français

par Philippe Allienne
Publié le 22 octobre 2021 à 11:28

Près de 60 ans après les accords d’Évian et l’indépendance de l’Algérie, les relations entre les deux pays sont plus tendues que jamais. La faute à qui ? Au président français Emmanuel Macron qui aurait mieux fait de tourner sa langue à de nombreuses reprises dans sa bouche. Sa sortie, le 30 septembre, sur la « rente mémorielle » entretenue par le « système politico-militaire », une « histoire officielle » qui ne tient pas compte de la vérité, et une non-existence de la nation algérienne avant la colonisation française a fait l’unanimité contre lui en Algérie. C’est vrai tant de la part des partisans du régime que des opposants. Son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, n’en finit pas de s’arracher le dernier cheveu de son crâne pour tenter de recoller les morceaux. Après le rappel à Alger de l’ambassadeur Mohamed Antar Daoud, il a dit regretter le départ de ce dernier et a rappelé le « profond respect du président français pour le peuple algérien ». Et, il n’était pas inutile de le préciser, « cela signifie aussi, bien sûr, le respect fondamental de la souveraineté algérienne ». Bien vu de la part du chef de la diplomatie, surtout quand on sait que le président algérien Abdelmadjid Tebboune avait précédemment exprimé ses exigences : « Le retour de l’ambassadeur d’Algérie à Paris est conditionné par le respect total de l’État algérien. » Emmanuel Macron avait pour sa part exprimé son souhait d’apaisement. Rien des bonnes intentions annoncées du chef de l’État français ne peut retisser réellement les liens et la querelle risque de durer. Au mieux aurions-nous pu attendre un acte très fort lors de la commémoration des massacres du 17 octobre 1961. Il est certes le premier président français né après la guerre d’Algérie à s’être rendu sur un lieu de mémoire de cette nuit sanglante, le pont de Bezons. Il a certes reconnu et regretté « les crimes commis cette nuit-là sous l’autorité de Maurice Papon [des crimes] inexcusables pour la République ». De l’avis de nombreux vétérans du 17 octobre, il n’est pas allé suffisamment loin. Il n’a pas reconnu que ces massacres étaient un crime d’État, il n’a pas été question d’excuses. À Alger, le président Tebboune ne cache pas son insatisfaction. Dans le contexte actuel très tendu, sans compter sur les élucubrations d’un trublion fasciste qui veut se positionner à droite de Marine Le Pen (en niant par exemple le massacre), il semble bien que le président français ait manqué une occasion historique. Rendez-vous au 19 mars 2022, date anniversaire des accords d’Évian. Mais Emmanuel Macron aura d’autres préoccupations.