« Avec tambours et trompettes »

par ERIC BOCQUET
Publié le 6 mars 2023 à 15:28

Quand les gouvernements récupèrent quelques milliards au titre de la lutte contre l’évasion fiscale chaque année, à l’heure des bilans, on en entend parler. Le ministre Gabriel Attal claironne avoir récupéré 14,6 milliards d’euros l’an dernier. Nous sommes très loin du compte. Ce résultat est certes meilleur que celui de 2021, mais moins bien qu’en 2015, 2010 et 2018, les résultats oscillaient entre 16 et 21 milliards. Rien d’historique donc dans le chiffre avancé cette année. Beaucoup de communication pour montrer à nos concitoyen·ne·s que le gouvernement ne laisse pas faire les fraudeurs... Tout au moins, il voudrait le faire croire. Les syndicats des finances publiques rappellent sans cesse ce chiffre estimé entre 80 et 100 milliards d’euros perdus chaque année par la République du fait de tous les systèmes sophistiqués d’évasion fiscale. D’ailleurs, au titre de l’année 2022, il y a la condamnation de McDonald’s France, épinglé par le fisc français à hauteur de 1,2 milliard d’euros. Il s’agit de l’aboutissement d’une enquête initiée il y a dix ans, un redressement de 737 millions d’euros, plus une amende de 508 millions en contrepartie de l’arrêt des poursuites judiciaires. Oui, vous avez bien lu et c’est là où nous exprimons un désaccord de fond avec le ministre. Gabriel Attal, comme avant lui Bernard Cazeneuve, Gérald Darmanin, aux Comptes publics à l’époque, ont tous considéré qu’il était préférable de « négocier », « transiger » avec le fraudeur, plutôt que de poursuivre en justice. Leur argument commun consistant à dire : « Il vaut mieux être sûr de récupérer une partie de la somme plutôt que d’aller en justice, car c’est beaucoup plus long et on n’est pas sûr de gagner. » Cela s’appelle, dans le droit français, une CJIP (Convention judiciaire d’intérêt public) créée en 2016 par la loi Sapin. Cela veut dire que la République capitule et cela nourrit le sentiment d’une justice à deux vitesses. C’est intenable !