J’ai fait un cauchemar les amis...

par ERIC BOCQUET
Publié le 24 janvier 2020 à 11:42

La nuit dernière, j’étais de sortie avec mon épouse, nous allions assister à un concert au théâtre Sébastopol à Lille. Quelle ne fut pas notre surprise en arrivant de constater que le nom du théâtre avait changé. Il s’appelle désormais le théâtre Auchan-Mulliez. Nous renonçons à notre soirée et décidons de rejoindre la gare Lille-Flandres. Même choc, elle s’appelle aujourd’hui gare Lille-Veolia. Au passage, nous avons dû traverser l’ex-place de la République devenue place Leroy-Merlin.

Nous optons finalement pour le taxi pour rentrer sur Marquillies. Il nous faut, après le périphérique sud alors concédé au groupe Eiffage, reprendre l’autoroute A25 rebaptisée autoroute Cargill avec un péage de 30 euros à la clef pour les quelques kilomètres que nous avons à parcourir.

Retour à Marquillies. Je découvre avec horreur que la mairie porte désormais une énorme enseigne Heineken, ils ont même osé l’étoile rouge sur leur logo. Nous arrivons dans notre rue qui s’appelle maintenant la rue de la Société Générale. Ils sont fous ! Je me couche enfin... « Vous êtes bien sur France Inter, radio de service public », mon radio-réveil me sort enfin de ce cauchemar...

On dit souvent que les rêves sont une forme de réinterprétation de nos activités de la journée. Il y a quelque temps, j’ai relu un article du Monde Diplomatique datant de mars 1998, écrit par Pierre Bourdieu, sociologue et professeur au Collège de France. Il nous explique sa définition du néolibéralisme : « C’est un programme de destruction des structures collectives capables de faire obstacle à la logique du marché pur. » Or, ce marché accroît régulièrement son emprise sur nos vies quotidiennes. Ne va-t-on pas assister à un match de football de l’OM au stade Orange Vélodrome ou à l’Allianz Riviera à Nice ?

Les réflexions sont en cours, à la Métropole européenne de Lille, pour attribuer un nouveau nom au stade Pierre-Mauroy contre espèces sonnantes et trébuchantes.

Les supporters du club londonien d’Arsenal FC se rendent désormais à l’Emirates Stadium. Pour les amateurs de rugby, le match Irlande-France des Six Nations a lieu maintenant à l’Aviva Stadium, nostalgie de l’ancien stade de Lansdowne Road à Dublin. Enfin, vous n’allez plus au Palais omnisports de Paris-Bercy, l’ex-POPB, mais à l’AccorHotels Arena... On pourrait ainsi multiplier les exemples.

Je reviens à Bourdieu, dans son article il nous explique que la grande utopie néolibérale organise l’imposition intrusive des valeurs commerciales comme une sorte de machine infernale. Les réflexions sont en cours, à la Métropole européenne de Lille, pour attribuer un nouveau nom au stade Pierre-Mauroy contre espèces sonnantes et trébuchantes. Le marché n’a pas de limites... Sachons-le !