Une année dingue

par ERIC BOCQUET
Publié le 22 janvier 2021 à 15:47

Dernier coup d’œil dans le rétroviseur en ce début d’année. Imaginons un être humain qui aurait quitté la Terre le 15 février 2020 et serait rentré sur notre bonne vieille planète, voyage intergalactique imaginaire sans aucune nouvelle de chez nous. Notre congénère achète Le Monde à son retour le 31 décembre 2020 et il lit, en haut de la page 12 du supplément « Économie et Entreprises », ce titre : « La folle année des marchés financiers », et en sous-titre « Malgré la Covid-19, la Bourse américaine a flambé grâce aux liquidités injectées par les banques. » Aux États-Unis, la Banque centrale s’appelle la « Federal Reserve », la « FED » pour les initiés. La Banque centrale européenne a utilisé elle aussi son « bazooka monétaire », l’une de ses missions est de « battre monnaie », elle imprime les billets et les injecte dans les circuits financiers, les banques. Les États ont mobilisé des fonds, y sont allés de leurs plans de relance, l’Allemagne 130 milliards, la France 100 milliards, même l’Union européenne s’est engagée pour 750 milliards. Tous ces milliards ont alimenté les circuits financiers. Ce qui frappe avec cette euphorie en dollars et en euros, en face, c’est l’état de notre économie réelle. Notre voyageur de l’espace découvrira vite la face B de cette folie financière, complètement déconnectée du monde réel. Les faillites sont nombreuses, le chômage s’envole, la pauvreté explose, la crise sociale entraîne une sorte de crise psychologique collective. L’annonce de la sortie du vaccin dans des délais records redonne espoir et voilà que la campagne de vaccination démarre à la vitesse de l’escargot, une véritable fatigue globale s’installe, nous ne vivons plus une vie normale. À force de déshabiller l’État au nom du dogme de la réduction de la dépense publique, on n’arrive plus à organiser efficacement la mobilisation générale. N’aurait-il pas fallu encourager il y a bien longtemps la coopération entre tous les grands groupes pharmaceutiques européens, au lieu de pousser les feux de la concurrence ? Quand nous disons « réorienter l’argent vers les grands besoins humains », voici une magnifique occasion de passer à l’acte. Le changement de société est toujours à l’ordre du jour et c’est un combat qui doit rassembler.