Covid-19 : chronique d’une mort annoncée

par Lydie LYMER
Publié le 10 décembre 2021 à 12:29

Lors de l’annonce des mesures adoptées pour faire face à la cinquième vague, Olivier Véran a rappelé son soutien à « l’ensemble de la communauté des soignants ». Mais dans les cortèges du 4 décembre, les professionnels de santé ne demandaient pas au gouvernement « qu’il augmente encore l’effet de freinage sur la circulation du virus ». Leur malaise préexistait à la pandémie. Les réformes successives menées selon une logique comptable ont conduit les hôpitaux à multiplier les actes afin d’équilibrer des budgets de plus en plus étroits. Les personnels utilisés pour gagner en productivité ne reconnaissent plus le sens de leur mission. Pendant le premier confinement, les contingences administratives avaient presque disparu. Malgré le stress d’être confrontés à un virus inconnu, les soignants ont retrouvé leur place au service des patients. Cette parenthèse a rendu les conditions de travail dégradées encore plus difficiles à supporter dès l’été 2020. Avant la pandémie, les soignants protestaient contre les restrictions budgétaires, les compressions d’effectifs et le manque de moyens. Depuis, ils s’en vont. 180 000 infirmiers de moins de 62 ans ont démissionné et ce ne sont pas les 183 euros de revalorisation salariale du Ségur qui les ont retenus. En octobre, un tiers des postes de paramédicaux étaient vacants. De nombreux hôpitaux, comme celui de Lille, ont réactivé leur plan blanc qui permet, face à une situation exceptionnelle, de mobiliser des moyens supplémentaires. Mais l’exception est devenue la règle. Et l’hôpital fait fuir. 1 300 élèves infirmiers ont interrompu leur cursus entre 2018 et 2021. Selon une enquête récente, 75 % des internes en médecine présentent des signes d’anxiété, et 40 % des signes de dépression. Selon les promotions, 5 à 15 % des reçus en première année abandonnent leurs études. La santé malade d’excès d’austérité est à l’agonie. Et les hommages aux blouses blanches sont indécents de la part d’un gouvernement qui reste sourd à leurs alertes.