Quand t’es dans le désert depuis trop longtemps, tu t’demandes à qui ça sert...

par Lydie LYMER
Publié le 9 juin 2022 à 23:39

Une année d’études supplémentaire, c’est tout ce qu’a trouvé le gouvernement pour pallier aux déserts médicaux. Le cursus atteindrait dix ans. Les médecins quitteront bientôt la fac pour prendre la retraite. Si c’était pour améliorer la qualité de leur formation, encore… Mais non : en 10e année, le docteur junior exercerait en désert médical. Et c’est là où le bât blesse. L’encadrement des internes, qui représentent 40 % des effectifs médicaux de l’hôpital, est déjà insuffisant. La moitié subit des violences sexistes ou sexuelles. Leur temps de travail dépasse largement le cadre de la réglementation. Ils endossent de lourdes responsabilités, redoutant l’erreur médicale. 67 % des internes sont en état d’épuisement professionnel. Près d’un sur cinq arrête ses études. Et on enverrait ces bleuets au front, pour achever leur motivation ? Le docteur junior agit en autonomie supervisée par le praticien dont il relève. Mais un généraliste sur deux a plus de 60 ans, et tous sont débordés ! Que fera-t-il, seul, Junior, face à un accouchement inopiné, à une fin de vie, face à la misère sociale ? Les internes en médecine ne peuvent pas être la variable d’ajustement des coups portés à notre système de santé par des décennies de choix politiques austéritaires. Quant à augmenter le nombre d’étudiants, arrêtons la démagogie ! Notre capacité de formation est à saturation. Les amphithéâtres sont trop petits. Il manque de médecins pour en former d’autres. Et chaque lit fermé est un terrain de stage en moins. Si le gouvernement veut des médecins efficients, il n’a qu’à ouvrir les tiroirs de la commission de validation du Centre national de gestion. 3 000 dossiers de praticiens diplômés hors Union européenne y dorment. Ces professionnels qualifiés enchaînent les contrats précaires sous surveillance d’un supérieur, quand ils ne sont pas employés comme brancardiers ou au chômage. Il faut désenclaver les déserts médicaux et les rendre vivants. Redéployer un maillage de services publics, d’écoles, d’hôpitaux et de maternités de proximité. Les jeunes médecins ne veulent pas s’installer dans un désert, avec des règles un peu truquées du jeu qu’on veut leur faire jouer les yeux bandés.