De l’Europe du moins-disant à celle du mieux-disant...

par ANDRE CICCODICOLA
Publié le 24 mai 2019 à 11:12 Mise à jour le 28 mai 2019

Les 850 salariés des usines Ford de Blanquefort en Gironde ont dû avoir un haut-le-cœur en entendant la nouvelle : le constructeur automobile américain va supprimer 7 000 emplois. Sont notamment touchées : l’Europe avec la France et désormais l’Allemagne où 5000 postes de travail vont disparaître. Le sort de Blanquefort est donc définitivement scellé et qu’importe si les propriétaires de Ford ont perçu plus de 25 millions d’euros de subventions publiques.

L’annonce de milliers de licenciements succède pourtant à deux années fastes pour l’entreprise.

Ses bénéfices se sont élevés à 6,8 milliards d’euros en 2017 et à 5,3 milliards en 2018.

Mais alors, pourquoi une telle saignée dans les emplois ?

Écoutons les arguments avancés par le PDG Jim Hackett dont le salaire de base annuel s’élève à 15,2 millions d’euros : « La restructuration en cours vise à économiser au total 22,8 milliards d’euros d’ici 2022 et Ford espère s’installer en tête du peloton ».

Il convient d’ajouter que cette Saint-Barthélemy des emplois permettra surtout de maintenir un taux élevé de la rémunération des actionnaires. Cette Bérézina sociale générée par le groupe américain est révélatrice. L’automobile vit une révolution. Une transition technologique prenant en compte le facteur humain serait possible. Mais en capitalistes militants, les riches propriétaires de Ford privilégient la rente. Ils règlent les problèmes en agissant d’abord sur l’emploi, devenu la variable d’ajustement. Ils réduisent le nombre des salariés. Ils augmentent la productivité de ceux qui restent et... au diable les conséquences pour les individus et les collectivités.

Voilà où conduit la dictature des marchés, la concurrence libre et non faussée dont le traité de Maastricht de 1992 a fait la règle dévastatrice du mode de fonctionnement économique en Europe. Lorsqu’il a été soumis au vote, nul ne pouvait ignorer ses finalités. Il fut même à l’époque, l’argument anti-Maastricht majeur avancé par feu Georges Marchais responsable communiste. Le parti de Ian Brossat et Lutte ouvrière ont été les seuls de tous les grands mouvements engagés actuellement dans la campagne des élections européennes à s’être opposés au traité maastrichtois.

L’Europe sortie du traité de Maastricht révisé par l’accord de Lisbonne est celle du moins-disant social. Ce principe envahit bien des champs de nos vies. Il n’y a pas qu’en Alabama que l’avortement est désormais passible de prison, en Pologne aussi. En France même, des ligues font pression pour une approche répressive de l’IVG. La régression sociale et parfois sociétale que nous traversons génère des frustrations et des inquiétudes dont l’extrême droite se repaît. L’élection du dimanche 26 mai est une occasion importante de manifester sa désapprobation à l’égard de cette politique dont le président Macron est actuellement le bras armé et de faire valoir une politique européenne prônant « le mieux-disant »... « Domaine social, éducatif, culturel, participation citoyenne... prenons ce que chaque pays a de meilleur et faisons-en la base de nos règles communes » avancent Ian Brossat et ses colistiers. Cette proposition frappée du bon sens et du sceau de l’humanisme est favorable au monde du travail. Que des ouvriers et des employés du privé et du public (grands oubliés de l’Europe) composent la liste Brossat, lui donne indubitablement du crédit.