L’apprenti sorcier de Washington ne fait pas mentir Jaurès

par ANDRE CICCODICOLA
Publié le 3 mai 2019 à 10:00

Donald Trump président de la première puissance armée du monde a décrété que pas une goutte de pétrole ne doit quitter le sol iranien. Il accompagne cette injonction de menaces à l’égard de Téhéran et des pays qui s’aviseraient d’importer son pétrole. Ces derniers se verraient infliger à leur tour des sanctions notamment économiques.

Ces mesures visent à assécher économiquement l’Iran dont le pétrole est la première ressource et monnaie d’échange. L’objectif de Trump est de provoquer un blocage économique, un appauvrissement, une pénurie généralisée et, croit-il, déclencher ainsi une révolte du peuple contre le régime persan et, finalement, asseoir un régime conforme aux intérêts américains. En particulier des pétroliers qui se frottent déjà les mains de voir le prix du brut tutoyer de nouveaux sommets annonciateurs d’énormes bénéfices. L’administration américaine prétend « obliger (l’Iran) à cesser ses ingérences flagrantes dans les affaires intérieures d’autres États (…) ». Au regard des immixtions constantes des États-Unis dans les affaires des pays du monde entier, on en rirait presque, si les conséquences de cette politique de Trump n’étaient aussi graves. C’est encore lui qui, pour les mêmes buts, a décrété le blocus du pétrole vénézuélien et appelé à renverser par la violence le président élu Maduro. Un scénario qu’il inflige à Cuba, « son ennemi héréditaire », mais cette fois pour des raisons politiques.

Outre leur inhumanité, ces dernières décisions de Trump à l’encontre de l’Iran sont totalement illégales au regard du droit international. Elles créent, de surcroit, une vive tension internationale. Il n’aura échappé a personne que ce diktat américain cible par la bande les intérêts de la Chine qui importe depuis l’Iran une partie des besoins pétroliers nécessaires à sa machine de production. Enrayer le développement économique chinois est une des obsessions de l’homme à la mèche. Dans le passé, des faits de cette nature ont déclenché de tragiques conflits.

On observera que la réaction de la Chine est restée modérée, non belliqueuse face à cette offensive étatsunienne. La Russie de Poutine, elle-même victime de sanctions, a adopté la même attitude. Elle a condamné verbalement les actes américains et félicité Téhéran de sa retenue face aux actes de Trump l’encourageant à maintenir cette position. Cette extrême prudence dont les diplomaties russe et chinoise font preuve vise manifestement à désamorcer la chevauchée provocante et infernale dans laquelle l’apprenti sorcier de Washington s’est lancé au risque de l’indicible. Mais, n’est-ce-pas le but que recherche cet entêté de Trump, nous rappelant que le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage ?

Cette situation appelle une observation : le silence fracassant de l’Union Européenne, de ceux qui la dirigent ou de ses pays membres. Le président Macron reste muet. Pourtant les intérêts de la France sont directement bafoués par les blocus décrétés par Washington. Airbus qui s’était vu commander par l’Iran une centaine d’avions pour un montant de 17,5 milliards d’euro voit son contrat tomber à l’eau et avec lui des milliers d’emplois. Mêmes conséquences pour Peugeot qui avait écoulé 443.000 voitures en Iran en 2018, et pour Renault et ses 162.000 véhicules vendus la même année. Les deux constructeurs nationaux détenant 40% du marché iranien.

Partenaires privilégiés et alliés des États-Unis, Macron, Merckel et les dirigeant de l’UE ont le pouvoir d’exercer une pression pacifique sur leur partenaire et de le contraindre à renoncer à cette politique aventureuse, agressive et dangereuse pour la paix mondiale. Ils ont surtout la carrure, individuellement et collectivement, pour ne pas tenir compte des menaces qui leurs sont adressées, en commerçant avec les pays mis à l’index au nom des seuls intérêts américains. Ils n’en font rien. L’esprit munichois de renoncement n’a pas disparu.