La Valls hésitation...

par ANDRE CICCODICOLA
Publié le 28 mai 2021 à 12:29

On savait Manuel Valls de perles ou plus exactement pécho de milliardaire à collier de perles. De ce côté, tout est clair. En revanche, ce qui l’est beaucoup moins, c’est son identité nationale. Une fois, il se déclare être « irrémédiablement espagnol », une autre « majoritairement français » ! On a recherché les causes de cette Valls hésitation identitaire. Son père espagnol, bien que vivant depuis des lustres dans un immeuble cossu du Marais à Paris, avait cependant désiré voir naître son fils en Espagne. Il y restera le temps de son premier cri et d’un baptême. Pour le reste, tout le tiendra en France, il demandera naturellement à bénéficier de la nationalité française dès ses 18 ans.

Manque de « blancos »

Nous sommes dans l’après 1981. Le Parti socialiste est alors en pleine ascension électorale. Le syndicat étudiant d’obédience socialiste, dont Manuel Valls est adhérent, lui sert de vivier à cadres. Faute d’être brillant, le jeune homme est bosseur, futé et un « réseauteur » averti, allant jusqu’à entrer en franc-maçonnerie qu’il quittera carrière assise. Il passe donc de la case « université » à celle de la politique, se découvrant très vite une passion pour les maroquins. Dans le mouvement de la vague rose, il franchit rapidement le statut d’attaché pour devenir conseiller régional. En 2001, grâce à l’union de la gauche, il devient maire et député d’Évry, une ville nouvelle située au sud de Paris dont il dira, une fois installé, qu’elle manque de « blancos » !

Fuite en avant

Le reste de son histoire est connu. Après une ascension pas à pas jusqu’au poste de Premier ministre, il butera devant la porte du Graal : la candidature à la présidence de la République. En janvier 2017, il est battu par Benoît Hamon à la primaire socialiste. Le peuple syndical socialisant ne lui pardonne pas d’avoir usé de l’article 49.3 pour imposer la « loi travail » cassant le code éponyme au bénéfice du monde de la finance et de l’industrie. Il refuse de soutenir son vainqueur. Avec cet échec, c’est la fuite en avant. On donne Fillon 100 % gagnant, aussitôt Manuel Valls lui fait une offre de service. Fillon mis hors jeu par « les affaires d’emplois fictifs », il se tourne fissa vers le challenger Emmanuel Macron dont il réclame l’investiture pour être réélu député et s’épargner de la débâcle socialiste annoncée. Il est sauvé in extremis grâce au soutien de l’avionneur milliardaire Serge Dassault, alors maire de Corbeil, et par le soutien de cinq autres maires eux aussi de droite. Ils lui apporteront les 139 voix supplémentaires sur 27 683 votants pour battre sa concurrente de LFI. Valls le sait, il a frisé la correctionnelle. Macron ignorant sa soumission, il voit sa carrière politique dans l’impasse. C’est à cet instant précis qu’il se découvre une âme catalane débordante mais jusque-là enfouie. « Ma vie et mon avenir sont à Barcelone » déclare-t-il en substance. Associé à la droite contre la gauche, moyennant 20 000 euros par mois et un budget électoral abondé par des financiers, des industriels et une milliardaire à perles, il part à la conquête de la mairie de Barcelone. Il sort de cette élection en caleçon, tout juste conseiller municipal dans l’opposition.

Déculottée ibérique

Cette déculottée ibérique aura pour conséquence de le faire passer de l’état « je suis irrémédiablement espagnol » à celui de « je suis majoritairement français ». Les trémolos patriotiques accompagnant cette nouvelle métamorphose confirment que l’impétrant tente un come-back politicien en France. Sans doute s’interrogea-t-il : le monde de l’argent espagnol lui avait fourni une rampe de lancement, mais en France, qui pour soutenir ce retour, se sachant quelque peu tricard ? Peut-être la réponse tient-elle dans le tweet dont il vient de se fendre. Il y écrit : « J’ai eu le plaisir de découvrir avec Susana Gallardo la passionnante collection Pinault dans l’incroyable Bourse de commerce (...). La France et Paris ont la chance de pouvoir compter sur François Pinault et son amour de la culture (...). » François Pinault, cité deux fois au milieu de propos dithyrambiques, n’est autre que le propriétaire du groupe de luxe Kering. Sa fortune est estimée à 32 milliards d’euros. Et puis, les deux hommes ont au moins un point commun : la justice aux trousses. Le premier pour « blanchiment de fraude fiscale aggravée » en 2018 et portant sur 2,5 milliards d’euros alors même qu’il a pu se payer sa Fondation (vantée par Valls) en partie grâce aux déductions fiscales ! Le second pour des frais de campagne électorale espagnole délictueux. Les mauvais comptes peuvent aussi faire de bons amis. Enfin dans les milieux bien informés, on laisse entendre que Valls se mettrait prochainement au biniou cher à Pinault. « Ma Doue benniget [1] ! » aurait dit ma mère qui était du même pays que le milliardaire mais côté exploités. Un mot encore : gardez cette histoire pour vous, car Marine Le Pen émerge déjà en tête des sondages pour le premier tour de la présidentielle avec un score évalué entre 27 et 30 % !

Notes :

[1Nom de Dieu, en Breton