L’hôpital malade du mépris et de l’irrespect de l’État

par Philippe Allienne
Publié le 22 novembre 2019 à 19:38

S’il veut attiser les tensions et la colère des hospitaliers, le gouvernement a trouvé la bonne recette.

Le « plan d’urgence » présenté ce 20 novembre par le Premier ministre Édouard Philippe n’est pas près de calmer les professionnels de santé qui, depuis de longs mois, se battent pour de meilleures conditions de travail. C’est bien sûr le cas des urgentistes, en grève depuis sept mois. C’est le cas d’autres professions, comme la psychiatrie, le personnel des Ehpad, qui se battent depuis plus longtemps encore. « Ce plan n’est jamais que le quatrième en 16 mois » , soupire le député du Nord Alain Bruneel. Et de citer a loi du 24 juillet relative à l’organisation et la transformation du système de santé (la loi « Ma santé 2022 »), l’annonce d’Agnès Buzyn pour les urgentistes en juillet dernier, les 750 millions d’euros sur trois ans débloqués à la rentrée (soit 250 M € par an).

Cette fois, le gouvernement affirme avoir « bien entendu le message des hospitaliers » et avoir bien pris conscience du malaise de l’hôpital. Sauf que le compte n’y est vraiment pas. Là où le personnel réclame une revalorisation de la grille des salaires et des embauches, le gouvernement répond par une série de primes à géométrie variable et finalement pas si élevées : des primes concernant un territoire particulier (l’Île- de-France), des primes au mérite, des primes catégorielles.

Une dette créée par l’État

On peut deviner que cette batterie pourra satisfaire quelques uns tout en aggravant le mécontentement de beaucoup. Faut-il y voir une manière subtile de diviser pour tenter de casser un mouvement profond et cacher une incapacité à répondre aux vrais problèmes ? Là où il faut davantage de personnel pour répondre à des équipes à bout de souffle, on saupoudre. Au passage, il n’est apporté aucune réponse à la demande de moratoire sur la fermeture des lits d’hôpitaux. Ce n’est pas l’humain d’abord, c’est la technique à coup de primes.

Certes, le Premier ministre a d’abord annoncé l’augmentation du budget de l’assurance-maladie à hauteur 1,5 milliard d’euros sur les trois prochaines années pour le secteur hospitalier. Cela revient à 600 000 euros par an alors que le budget 2020 impose une économie d’un milliard ! Enfin, l’État s’engage à reprendre 10 milliards sur la dette de 30 milliards des hôpitaux publics. Or c’est lui-même qui, à bien y réfléchir, a créé cette dette.

Si le gouvernement craint un 5 décembre particulièrement chaud et charpenté, il devrait surtout s’inquiéter de l’enracinement d’un mouvement qu’il contribue à installer dans la durée.