La voiture électrique démocratique n’est pas pour demain

par Philippe Allienne
Publié le 20 décembre 2019 à 11:16

Le 5 décembre, 1er jour de grève des transports publics et de mobilisation contre la réforme du système de retraite, tout le monde s’attendait à une circulation monstrueuse sur nos autoroutes, nos nationales et autour de la métropole lilloise. Dame, il faut bien aller travailler.

La veille, en raison de la pollution atmosphérique, le préfet avait déclenché la circulation différenciée, interdisant ainsi la circulation autour de Lille pour les véhicules les plus polluants et affichant une vignette « crit’air  » de classe 5 ou 6. Bizarrement, pour le 5 décembre, le pic de pollution s’était lui aussi mis en grève, libérant les vilains pollueurs de la veille. Et le réseau routier fut moins encombré que jamais !

On lira dans notre supplément de cette semaine, dédié à l’environnement, en quoi la vignette « crit’air » est une fausse bonne idée, voire une mauvaise solution à un vrai problème, celui du réchauffement climatique et du rejet de CO2. Outre qu’elle pénalise les personnes économiquement les plus fragiles, elle ne fait qu’encourager la vente d’automobiles et donc... la production de CO2. Les véritables alternatives devraient plutôt porter sur la promotion des transports en commun en les rendant plus incitatifs et plus performants pour tous.

La mesure de la MEL (métropole européenne de Lille) portant sur la gratuité durant les pics de pollution est un premier pas. Pour autant, ce n’est pas dans ce sens que se dessine l’avenir. Les ambitions affichées par le nouveau groupe Peugeot-Fiat qui envisage de vendre près de 9 millions de véhicules par an en sont un exemple frappant.

De son côté, le ministère de la Transition écologique et solidaire annonce qu’il va diminuer la prime pour l’achat de véhicules électriques. Il va certes maintenir le bonus de 6 000 euros pour les particuliers à condition que les achats ne dépassent pas 45 000 euros. Auquel cas le bonus serait ramené à 3 000 euros et à zéro pour l achat d’un véhicule supérieur à 60 000 euros. On devine que le smicard (et pas seulement) n’est pas concerné par ce coup de rabot.

Mais le gouvernement, qui diminue par deux le bonus pour les véhicules de société, compte-t-il exclure pareillement les collectivités territoriales ? Une ville, par exemple, qui met en place la circulation généralisée à 30 km/h et qui souhaite renouveler son parc automobile, pour ses agents, devra-t-elle dépenser plus pour le convertir aux véhicules électriques ?

Pour le gouvernement, la réponse est arithmétique. Estimant que le prix des modèles électriques va diminuer avec la massification du marché, il conclut que le montant des aides doit diminuer. Il ne dit pas que cette diminution doit être proportionnelle. Et comme les prévisions tablent sur la vente de 160 000 véhicules électriques par an en France, à partir de 2022, ce mode de déplacement ne risque pas d’être particulièrement démocratique.