Le bon temps du macronisme sur les rails

par Philippe Allienne
Publié le 28 décembre 2018 à 11:16 Mise à jour le 10 janvier 2019

« Chez les cheminots, la colère monte », peut-on lire dans le précédent numéro de Liberté Hebdo qui nous révèle les menaces pesant sur l’avenir des dessertes régionales TGV. Le dossier du transport ferroviaire, et la manière dont le gouvernement a « géré » le plus grand conflit social du rail depuis 1995, résument la perversité du discours macronien. La langue de bois, les fausses reculades, le double langage et sa froide détermination teintée de mépris constituent l’essentiel de la panoplie de ce gouvernement. Les Gilets jaunes, dont on a compris qu’ils s’apprêtent à reprendre leur combat dès le début de 2019, n’ont qu’à bien se tenir face aux signes apparents de détente.

Revenons sur ces 36 journées de grève des cheminots réparties du 22 mars au 28 juin. La CGT et Sud Rail se sont battus avec courage. L’Unsa et la CFDT ont voulu composer et négocier. De cette bataille reste un gagnant : le gouvernement. La direction de la SNCF et la langue fourchue de son président Guillaume Pépy n’ont rien à craindre. Ceux qui voulaient le retrait du projet de loi pour un « nouveau pacte ferroviaire » en sont pour leurs frais. Adoptée définitivement le 14 juin dernier, la loi casse pour de bon le statut des cheminots qui avait été conforté lors de la création de la SNCF en 1937 et qui, notamment, garantissait l’emploi. Un comble pour des libéraux comme ceux qui nous dirigent depuis trop longtemps.

A défaut du retrait du projet de loi, la CGT et Sud Rail demandaient le maintien du recrutement au statut de la SNCF. La loi le supprime. L’ouverture à la concurrence de tous les services a bien été actée et une nouvelle gouvernance pour le groupe sera mise en place.

Qu’a « lâché » le gouvernement ? Peu. Très peu. La SNCF va se transformer en société anonyme à capitaux publics. Elle sera détenue intégralement par l’État et ses titres seront incessibles. Mais jusqu’à quand ? Rien n’empêchera une modification de la loi pour modifier cette disposition. Par ailleurs, quand les cheminots seront transférés dans une autre société, ce sera sur la base de leur volontariat. Ils pourront revenir à la SNCF dans un délai compris entre 3 à 8 ans. Ils garderont leur rémunération nette durant un an, le minimum garanti, la garantie de l’emploi et leur affiliation au régime spécial de retraite. Mais jusqu’à quand ? Concernant les retraites, on sait au moins que la réforme en cours supprimera les régimes spéciaux.

Nouvelle convention collective

Les cheminots peuvent aussi se demander ce que donnera la nouvelle convention collective du transport ferroviaire. En cours d’élaboration, elle devrait être présentée fin 2019. Quant au transport lui-même, l’avenir est sombre pour les petites lignes et pour les lignes secondaires. Notre transport régional, malgré la participation importante du Conseil régional des Hauts-de-France, en pâtira sûrement. On ne peut plus raisonnablement parler d’aménagement du territoire.

Le statut des cheminots, et les cheminots eux-mêmes, ont eu bon dos. Six mois après la fin de la grève de mars-juin, les salariés découvrent que la SNCF prévoit de supprimer plus de 2000 emplois en 2019. Les usagers du TGV subissent des retards quotidiens et sont peu ou pas du tout dédommagés. Les TER ne sont pas mieux lotis avec de problème de sécurité que l’on ne peut plus cacher, des modifications d’horaires et une raréfaction des guichets qui ne prennent pas en compte les besoins des travailleurs. C’est le bon temps du macronisme.