Je n’ai pas lu le roman de Bruno Le Maire et je ne lirai probablement jamais. À part la page érotique qui fleurit sur les réseaux, comme tout le monde. Je n’aime pas le Bruno Le Maire politique. Il incarne une sorte de libéralisme totalement anachronique et il a une pensée économique à peu près aussi exaltante qu’un plat de coquillettes sans beurre, sans jambon, sans gruyère râpé, sans rien. Ancien LR affichant un gaullisme ornemental, il s’est rallié au président le plus antigaulliste qui soit. Le Maire est son fidèle exécutant et il est bien mal récompensé par les agences de notation qui dégradent la note de la France en motivant explicitement leur décision par l’incapacité de faire passer une réforme sans mettre le feu partout. Mais je n’aime pas non plus la façon dont on se moque de lui à propos de son roman. On peut extraire une page d’à peu près n’importe quel livre, même d’un très grand écrivain, et tourner l’auteur en ridicule. Je n’aime pas non plus l’argument qui consiste à dire que trouver le temps d’écrire un roman supposerait qu’on fasse mal son travail. C’est une des raisons qui m’ont fait quitter l’Éducation nationale. Jusque dans les années 90, publier un livre était considéré par la hiérarchie comme un plus, la preuve que l’Éducation nationale avait des profs formidables. Puis au fur et à mesure que le langage managérial gagnait l’école, toute activité extra-pédagogique a été considérée comme suspecte. Le désir d’écrire, la passion d’écrire, c’est comme la Grâce, elle frappe où elle veut, qui elle veut, quand elle veut. Est-ce que BLM est possédé par cette passion, est-ce qu’il est écrivain ? Je n’en sais rien et personne ne le sait. Alors, attaquons-le, mais pas là-dessus. La seule chose qu’on pourrait lui conseiller, c’est de publier sous un pseudo. Là, il se confrontera à un jugement qui ne sera pas faussé ni par la complaisance ni par la mauvaise foi.