Emmanuel Macron l’halluciné

par JEROME LEROY
Publié le 6 janvier 2023 à 09:59

Finalement, peut-être que son entourage lui ment, comme le faisait le ministre Potemkine avec l’impératrice Catherine II de Russie en lui faisant visiter, à chacune de ses sorties, des villages pimpants qui n’étaient que des façades cachant la misère noire du pays. Ou alors peut-être est-il enfermé dans un univers parallèle comme un personnage de Philip K. Dick, un monde de simulacres, produit par l’ingestion d’un psychotrope particulièrement puissant qui altère la réalité. Sinon, il n’aurait aucune excuse. On a beau savoir que la présidence de la Ve République est un poste qui isole, qui vous coupe du quotidien des Français, il y a tout de même des limites. On a beau savoir, aussi, que l’exercice des vœux aux Français est totalement artificiel, conjuguant un optimisme obligé avec une autoglorification convenue, la sixième allocution de Macron a dépassé l’entendement. Deux points ont été particulièrement marquants en matière de projections délirantes. D’abord, le fait qu’il continue à prétendre avoir été élu sur son programme, ce qui est faux puisque, pour la seconde fois, il a été élu contre Marine Le Pen. Et comme le point phare de son programme, c’est la retraite à 65 ans, Macron joue à être missionné pour cette mesure dont les trois quarts des Français ne veulent pas. La retraite à 65 ans, Macron pourrait prétendre qu’il l’impose pour des raisons purement idéologiques - il a prononcé dix-sept fois le mot « travail » - comme si vivre se résumait à travailler. Macron pourrait aussi avouer qu’il l’impose pour que la part des retraites dans le PIB, environ 14 %, baisse de quelques points et faire ainsi plaisir au FMI. Mais on ne peut pas dire qu’il l’impose pour sauver le système par répartition qui, s’il était menacé, le serait d’abord par le chômage des seniors, la faiblesse des salaires et le refus de faire cotiser davantage le patronat (la « ligne rouge » selon Élisabeth Borne). L’autre projection délirante, et non des moindres, est quand il dit que rien ne pouvait laisser prévoir la crise climatique. Le réchauffement et le rôle des activités humaines est évoqué explicitement depuis 1988 par Hansen, un climatologue de la Nasa, enquêtant sur le phénomène à la demande du Sénat américain. Que Macron ait été surpris par le Covid, d’accord, par l’invasion de l’Ukraine, encore d’accord, même si on pouvait penser qu’un jour ou l’autre, depuis 2014, ça pourrait exploser à tout moment. Mais sur le climat, sincèrement… Ou peut-être a-t-il voulu dire qu’il était surpris par la rapidité et l’intensité des catastrophes climatiques de ces dernières années. Là, à la rigueur, on pourrait l’admettre. Mais il risque, pour le coup, d’avoir une autre surprise, c’est la rapidité et l’intensité de la riposte de la rue, le 10 janvier, quand il voudra aller jusqu’au bout de son hallucination et qu’il se heurtera à la réaction d’un peuple qui en a plus qu’assez de devoir choisir entre se chauffer et se nourrir, se soigner dans un hôpital en voie d’effondrement ou se déplacer dans des transports en commun chaque jour plus obsolètes…