Je ne sais pas trop quoi penser de la une de Libération du 28 septembre qui a pour titre : « Une femme pour sauver la gauche ? » et qui, à la façon d’une vitre éclatée, montre en allant de haut en bas et de gauche à droite Clémentine Autain, Anne Hidalgo, Delphine Batho, Christiane Taubira, Manon Aubry et enfin la camarade Elsa Faucillon, jeune députée des Hauts-de- Seine. Ça me fait plaisir que Libé ait pensé tout de même à mettre une communiste. On ne peut pas dire qu’on parle souvent des communistes. Par exemple, dans les débats et commentaires déjà peu nombreux sur les sénatoriales, on n’a jamais parlé du groupe communiste qui sort renforcé avec deux sénateurs de plus alors qu’on s’est beaucoup attardé sur l’unique élu RN.
Mais revenons à cette une de Libé. Quelque chose me gêne. Peut- être parce que cela me fait penser aux magazines féminins qui consacrent un numéro par an aux rondes, histoire de remplir leur cahier des charges d’hypocrisie bienveillante. Un numéro pour les femmes de gauche et dès demain, business as usual, on reprend les hommes et les fringues pour taille 34. J’adorerais voter pour une femme de gauche aux présidentielles. J’adorerais aussi voter pour un homme de gauche. Je préfèrerais même voter pour un homme de gauche s’il est plus à gauche que la femme de gauche. Vous me suivez ? Parce que tout de même, le discours de certaines femmes (et de certains hommes) sur la place des femmes en politique n’est pas très clair. Elles apporteraient quelque chose « de plus »... Mais quoi ? J’espère ne pas entendre des réponses telles que les femmes auraient une pratique différente et seraient moins belliqueuses. Des tas d’anciens combattants des Malouines pourraient vous dire qu’une femme qui a décidé de faire la guerre, elle la fait et sans pitié. Aux Argentins ou aux mineurs en grève de son propre pays.
Il est insupportable, c’est vrai, de ne pas voir assez de femmes en politique, mais bon, il y en a toujours plus à l’Assemblée nationale que des ouvriers, par exemple, où il n’y en a plus un seul. Et je ne vous parle pas des ouvrières. Il est tout aussi énervant de voir que Marine Le Pen est la seule femme cheffe de parti qui soit arrivée au second tour de la présidentielle, alors qu’elle est en théorie issue de ce qui est censé se faire de pire en matière de virilisme machiste. Cela devrait relativiser le côté « sauveuse suprême » envisagé par Libé. Mais encore une fois, je trouve qu’une femme présidente de la République, ce serait bien et qu’il n’y a pas de raison que la femme qui représente la moitié de la population n’accède pas à la magistrature suprême. Si elle est de gauche avant d’être femme. Parce qu’au bout du compte, en politique, on devrait s’en moquer un peu du genre ! Mais il est vrai que c’est compliqué dans la Vème République qui transforme l’élection, pour les hommes comme pour les femmes, en concours de beauté encadré par des communicants.