Le Monde de Sophie

Lu dans un quotidien du soir de référence, au détour d’un portrait de Sophie Binet qui vient d’être élue à la tête de la CGT : « Au début des années 1970, la centrale f lirtait avec les deux millions d’adhérents et pensait atteindre l’objectif des trois millions. En 2020, derniers chiffres officiels, elle n’affichait plus que 606 000 encartés. » J’adore le « plus que 606 000 encartés ». Oui, c’est sûr, ce n’est pas beaucoup, 606 000 encartés. Pour prendre une comparaison, ça fait à peine 480 000 de plus que les 120 000 exemplaires du quotidien du soir de référence. C’est dire. Mais bon, ces gens ont de drôles de manières de compter. Le soir du jeudi 6 avril, il n’y aurait eu QUE 800 000 manifestants selon la police et cela n’aura jamais été QUE la 11e journée de grève. Question accessoire : « Qu’est-ce que la représentativité pour la presse bourgeoise ? » Vous avez quatre heures. C’est drôle tout de même, je cherche en vain quel parti de droite, macroniste ou LR, pourrait se vanter de 600 000 adhérents. LR, à la louche, c’est un petit 48 000. C’est pourtant LR dont Renaissance, le parti présidentiel (30 000 adhérents), a rêvé (sans succès) de faire un allié pour imposer au Parlement son projet de voler deux ans de temps libéré aux travailleurs français. Ensuite, pendant la manif, Sophie Binet a choqué les belles âmes en refusant de répondre à CNews. Comment pouvait-elle oser ce refus du « pluralisme » ? Peut-être bien au nom de ces 600 000 adhérents, justement. 600 000 adhérents dont les valeurs et le courage pendant ce mouvement social n’ont rien de commun avec ce qui est véhiculé à longueur d’émissions (qui souvent n’ont pas 600 000 spectateurs) par la chaîne du très réactionnaire Bolloré qui en a fait une arme idéologique bien plus qu’une chaîne d’informations. Elle a bien raison, Sophie Binet. Desproges disait qu’on pouvait rire de tout mais pas avec tout le monde. La nouvelle secrétaire générale de la CGT pense, elle, qu’on peut parler de tout mais pas avec tout le monde. Et elle le pense, justement, au nom de 600 000 adhérents...