Marx à Ericeira
MarxLa mer est bleue comme jamais à EriceiraOnde o mar é mais azulSur le panneau en azulejosEt ta théorie de la valeurSe vérifie quand je commande mon imperialÀ la terrasse d’un bar des FurnasMarxLa mer est à cinq ou six mètresC’est à Ericeira que la famille royale portugaiseEmbarqua le 2 octobre 1910Pour un exil définitifEt que le Portugal entrait dans la révolutionIndustrielleConfirmant encore une fois tonManifesteC’est la bourgeoisie qui fait les révolutionsBourgeoisesCroire le contraire est une erreur n’est-ce pasMarxN’est-ce pasLa mer est la même que l’année deL’abdicationÀ EriceiraLa mer ne change pasComme la validité de ta philosophieMarxJe pourrais aller à Mafra CintraOu bien LisbonneMais l’été et les années me rendentParesseuxIl y a dix ans déjà déjà dix ansJ’étais à EriceiraOn payait encore en escudosEt c’était l’exposition universelle de 1998Et le devenir-monde de la marchandise se réalisaitMarxJe me souviens du pavillon poétique et minusculeDe la SlovaquiePays sans rivages dans une exposition consacrée àL’OcéanPavillon poétique et paradoxalQui avait décidé de montrer la merComme le rêve d’un rêve de ses poètesUn débarcadère donnait sur une plaine virtuelleEt les vagues s’entendaient comme des regrets dans des bafflesInvisiblesLe beau songe d’un pays endormiMarxLe désir de la mer était la mer du désirLe renversement dialectique est la seule poésie du réelDans le Portugal de 1910 ou de 1998 ou de 2008Dix ans déjà déjà dix ansEt quoiDeux ou trois romans quinze ou seize kilos vingt ou trente poèmesJe ne compte pas ce que j’ai lu et buJe ne compte pas ce que j’ai pleuré ou riJe suis trop paresseux pour çaComme je suis trop paresseux pour aller à Mafra CintraOu bien LisbonneDix ansMarxDix ansJe lisais ta Guerre Civile en FranceSous la couverture orange des Éditions SocialesEt je la relis maintenant sous la couverture chic des éditionsMille et une nuitsMais ton texteMarxContraire à moiMes amours mes idées mon sang mes folies mon tempsTon texteMarxLui n’a pas changéRigoureux cinglant précis ironiqueComme la mer à EriceiraLa mer qui ne change pas non plus.
Un dernier verre en Atlantide (La Table Ronde, 2010)