Citoyen gendarme, réveille-toi !

par Philippe Allienne
Publié le 18 juin 2021 à 13:23

En période d’élection, quand on est dans l’incapacité physique de se rendre au bureau de vote on peut exprimer son choix par procuration. Encore faut-il en faire la demande. En principe, il suffit de se rendre au commissariat de police le plus proche, ou à la gendarmerie. « Certes. Mais si on ne peut se déplacer, “comment c’est-il que c’est que l’on fait ?”  », comme dirait mon petit neveu de trois ans qui fait actuellement ses études à Mat’Sup [1]. option pâte à modeler. Eh bien, cher petit neveu bientôt diplômé, il suffit de demander qu’un policier ou un gendarme vienne prendre le thé chez la personne concernée et reparte avec la procuration signée en bonne et due forme. CQFD. « Oui, mais... », me répond effrontément le petit neveu jesaistout. Et là, je sens venir la prise de tête. C’est que, effectivement, les choses simples deviennent subitement compliquées. Exemple : cela se passe dans un l’hôpital public du Pas-de-Calais. Jérôme est hospitalisé et ne peut accomplir son devoir de citoyen pour les législatives partielles qui se tiennent chez lui. Il demande à son médecin d’appeler la gendarmerie afin qu’on lui envoie un gendarme qui recueillera sa procuration. Le médecin croit à une plaisanterie. Jérôme se débrouille et parvient à joindre la gendarmerie. Elle le renvoie dans ses... vingt-deux. Il fait appel à une de ses connaissances qui se déplace chez les Pandore et obtient, non sans mal, le précieux document. Ce n’est pas très légal mais on dira que le gendarme s’est déplacé en personne à l’hôpital. Jérôme a voté. Plus tard, sorti d’affaire, il se rend à la gendarmerie pour demander des explications. Le jeune militaire qui le reçoit lui assure qu’on ne lui a jamais appris cette possibilité. Jérôme, bonne pâte qui refuse de se laisser modeler, lui remet un texte officiel montrant les obligations de nos amis en uniforme. Dans l’Oise, Frédérique témoigne des immenses difficultés rencontrées pour « obtenir qu’un gendarme se rende à l’Ehpad, où résident ma mère et sa sœur, afin de recueillir leur demande de procuration à l’occasion des élections départementales et régionales  ». Elle a téléphoné sans cesse à la gendarmerie, durant une dizaine de jours avant de s’y rendre et de rédiger une demande écrite. Elle a fourni le texte qu’elle a imprimé à partir du site gouvernemental service-public.fr : « ... Si vous ne pouvez pas vous rendre au commissariat de police ou à la brigade de gendarmerie en raison de maladies ou d’infirmités graves, vous pouvez demander à ce qu’un officier ou agent de police judiciaire se déplace à votre domicile (ou dans un établissement spécialisé comme un Ehpad) pour établir (...) une procuration. » L’Ehpad est situé à moins d’un kilomètre de la gendarmerie. Les gendarmes objectent cette fois un surcroit de travail, un manque d’effectif. En fait, estime Frédérique, ils s’en fichent. De quoi ? Du respect des droits des citoyens et citoyennes.

Notes :

[1Maternelle supérieure, plus connue sous le nom de « grande section »