Il y a un mois, 4.000 hospitaliers tiraient le signal d’alarme sur la situation des services de pédiatrie sur fond d’épidémie précoce de bronchiolite. Ils sont, cette fois, 10.000 à revenir à la charge dans une tribune publiée, mercredi, par le journal Le Monde. Parmi eux, 400 chefs de service et quelques sommités comme les professeurs Robert Cohen, président du Conseil national professionnel de pédiatrie, et Rémi Salomon, président de la Commission médicale d’établissement des Hôpitaux de Paris. En un mot, c’est l’ensemble de la communauté médicale qui interpelle directement Emmanuel Macron, sur un ton nettement plus acerbe que la fois précédente.« Votre silence est assourdissant » dénoncent les soignants.« Vous n’êtes pas apparu pour rassurer les parents, assurer les soignants de votre soutien et de la volonté de sauver l’hôpital public (...) À la place, votre gouvernement empile les enveloppes et les mesures d’urgence temporaires au fil de la catastrophe, et remet en cause les constats unanimes des soignants et des patients ». Une critique à peine voilée de l’attitude du ministre de la Santé François Braun, plutôt lent à réagir, et qui s’était offusqué qu’on puisse en arriver à « trier » les enfants malades...
« Votre silence est assourdissant ! »
Les signataires reviennent sur la réalité vécue dans les services. Ils décrivent des « enfants hospitalisés sur des brancards ou sur les genoux de leurs parents aux urgences » ou « intubés et hospitalisés sans chambre dans le couloir de la réanimation » ainsi que « des prises en charge trop tardives et des soins précaires », « des retours prématurés à domicile et des retours en catastrophe d’enfants renvoyés chez eux faute de place. » Ils font état de leur culpabilité « d’envoyer des adolescents au sein de services adultes. » « Ce sont désormais des enfants âgés de trois ans que nous envoyons ». Pour ces professionnels de la santé, les transferts de patients entre hôpitaux de différentes régions constituent une dégradation grave des soins d’autant que tous les services de pédiatrie français sont saturés.
Les 10.000 signataires exigent d’Emmanuel Macron qu’il reconnaisse « la responsabilité de l’État dans la crise sanitaire majeure que nous vivons ». Ils lui demandent de s’engager « à prendre les mesures nécessaires pour sécuriser le travail des soignants à l’hôpital » dont celle de « la reconnaissance de la spécificité et de l’expertise de la pédiatrie. Le plafond du nombre de patients par infirmière et infirmier, le respect des temps de repos et des temps de formation, une meilleure indemnisation du travail de nuit et de week-end, des mesures ciblant la formation des jeunes engagés dans les métiers du soin, etc. » Ils lui demandent enfin de « remettre le service hospitalier au centre des décisions ». Ils espèrent que ces propositions seront discutées « plus spécifiquement lors des Assises de la pédiatrie, au printemps 2023. » « Une société qui ne peut plus prendre soin des enfants est une société sur le déclin », alertent encore les signataires, qui, en conclusion, interrogent : « Dos au mur, la France saura-t-elle sauver ses enfants ? »