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Invasion de l’Ukraine

La Guerre aux portes de l’Europe

par Philippe Allienne
Publié le 24 février 2022 à 23:17

Il l’a fait. Surprenant le monde entier, Vladimir Poutine a fait savoir que l’armée russe entrait en Ukraine. L’annonce, enregistrée 48 heures auparavant, a été diffusée par la télévision ce jeudi 24 février à 3 h 45. La guerre est aux portes de l’Europe.

Longtemps, on a pu croire que les menaces et pressions de Poutine n’iraient pas plus loin. Et puis, il y a eu la reconnaissance des républiques de Donetsk et Louhansk. En fait, il pensait au Donbass dans sa totalité. Finalement, des forces terrestres russes sont entrées, jeudi matin, sur le territoire ukrainien depuis la Russie et le Bélarus. La frontière ukrainienne a été violée dans les régions de Tcherniguiv (nord, frontière bélarusse), Soumy (nord-est, frontière russe), Louhansk et Kharkiv (est, frontière russe). Des explosions ont été entendues à Kiev, la capitale, ainsi qu’à Kramatorsk, dans l’est, qui sert de quartier-général à l’armée ukrainienne, à Kharkiv, deuxième ville du pays, et à Odessa, sur la mer Noire. La Russie affirme par ailleurs avoir détruit des bases aériennes et anti-missiles.  Ainsi, loin de la désescalade espérée, c’est le scénario inverse qui se produit, avec des menaces extrêmement violentes de Vladimir Poutine contre les États qui s’opposeraient à son action et des menaces de sanctions côté ouest. Depuis des semaines, la situation n’a cessé de se dégrader. « Les accusations et les récriminations entre les différents acteurs impliqués dans les discussions en cours ont créé de l’incertitude, et l’appréhension pour beaucoup qu’une confrontation militaire est imminente. » C’est ce que disait, il y a quelques jours, la secrétaire générale-adjointe de l’ONU, Rosemary DiCarlo. La tension n’a fait que croître jusqu’à en arriver à l’extrême. Dans un article publié sur son blog le 21 février, Jacques Fath, spécialiste des questions internationales (et ancien membre du comité exécutif du PCF), observe que « les responsables politiques et la plupart des médias occidentaux affirment ne pas savoir ce que veut réellement Poutine. La Russie a pourtant présenté ses demandes dès le mois de décembre 2021 sous la forme de 2 projets de traités internationaux très précis. Mais le contenu de ceux-ci n’a pas obtenu autre chose qu’une fin de non-recevoir. Les États-Unis et l’Otan ont rejeté ce qu’ils ont appelé des “non starters”, c’est-à-dire des paramètres irrecevables, des propositions sur lesquelles on refuse a priori d’engager toute forme de discussion. Malgré les formes du discours, ce fut une brutale récusation. Il est vrai que les exigences russes sont particulièrement élevées et probablement, pour certaines d’entre elles, hors d’atteinte pour Moscou qui devait s’en douter. Mais une négociation commence toujours par le haut. La diplomatie est un exercice difficile et patient qui doit servir à chercher et trouver des solutions, des compromis et des consensus. Washington a ainsi repoussé toutes les demandes russes tout en proposant de négocier sur des questions de sécurité d’un tout autre ordre (en elles-mêmes non négligeables). L’Administration américaine, comme elle l’a fait depuis 1989-1990 et le démantèlement de l’URSS, a ainsi éconduit la Russie, ce que ne voulait surtout pas Moscou qui cherche depuis des années à s’imposer comme acteur majeur et puissance que l’on doit respecter ». Pour Jacques Fath, il était peut-être encore temps, hier, pour que les autorités françaises et leurs partenaires européens prennent une importante initiative concernant notamment l’application des accords de Minsk. Aujourd’hui, on compte les premiers morts.