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Pologne

Arrestation d’un militant communiste

par JACQUES KMIECIAK
Publié le 16 juillet 2021 à 10:57

En Pologne, l’arrestation d’un militant communiste, à qui l’on reproche ses opinions prosoviétiques, témoigne de la dérive autoritaire d’un régime qui s’inscrit dans les pas de Pilsudski et des Colonels de sinistre mémoire [1].

Exilé en France, l’ouvrier communiste Michal Nowicki, en vacances en Pologne, a été interpellé le 7 juillet dernier, pendant son jogging matinal, par six agents de la Sécurité intérieure polonaise (ABW). Menotté, il a été conduit à la prison centrale de la rue Rakowiecka à Varsovie, où il a été interrogé. La « Justice  » polonaise lui reproche d’avoir fait sur le site « Odrodzenie komunizmu » (« Renaissance du communisme ») [2]l’apologie de l’URSS et de ses alliés et d’avoir ainsi « fait la promotion  » d’un système totalitaire (sic !) ; ce qui est passible d’une condamnation. Son appel à détruire une statue de Roman Dmowski, le fondateur de l’extrême droite polonaise, est tout autant blâmé par le pouvoir. Michal Nowicki est sorti libre, mais un procès lui sera intenté. Il entend bien s’en servir comme d’une tribune pour dénoncer la nature liberticide du régime en place.

Pratiques liberticides

Russophobe, aligné sur les positions de l’impérialisme américain et de l’OTAN, le parti Droit et Justice (PiS), au pouvoir depuis 2015, a pris pour cible toute personne qui manifeste des sympathies prorusses, prochinoises, pro-iraniennes ou procommunistes à l’heure où les activités violentes et illégales des groupes d’extrême droite bénéficient de sa mansuétude ! « En ce moment en Pologne, il y a un autre militant de gauche anti-impérialiste arrêté depuis plusieurs semaines, Janusz Niedzwiecki, sous l’accusation de propagation d’idées prorusses. Un autre militant et ancien député, Mateusz Piskorski, est toujours sous le coup d’une enquête qui l’empêche dans les faits de retrouver du travail et de voyager à l’étranger, après avoir passé près de trois ans en prison de façon tout à fait illégale selon le bureau des Nations unies pour les arrestations abusives. De son côté, le Parti communiste de Pologne (KPP) fait toujours l’objet d’un procès en délégalisation qui dure depuis plusieurs années et l’empêche de mener une activité normale », signale Bruno Drweski, politologue et historien spécialiste de l’Europe de l’Est.

La solidarité internationale s’organise, comme ici aux Pays-Bas, avec le KPP menacé de délégalisation.
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« Deux poids, deux mesures »

Étonnement, l’arrestation du youtubeur Michal Nowicki n’a guère suscité de réactions des autorités françaises ou de certains médias nationaux si prompts à s’émouvoir, en mai dernier, de l’interpellation de Roman Protassevitch, youtubeur lui aussi et opposant biélorusse, soupçonné d’avoir collaboré, en Ukraine, avec le bataillon Azov, une milice néonazie. Un assourdissant silence qui caractérise tout autant les dignitaires de la communauté franco- polonaise du Nord-Pas-de-Calais. Dans les années 1980, la frange la plus droitière et cléricale de la Polonia sermonnait pourtant volontiers le comportement de la Pologne populaire pour son attitude à l’égard du syndicat Solidarnosc qui finira

Notes :

[1Arrivé par un coup d’État au pouvoir en 1926, le maréchal Josef Pilsudski instaurera un régime autoritaire en Pologne. À sa disparition en 1935, le pays, flirtant avec l’Allemagne nazie avec qui elle a signé un pacte en 1934, sombrera dans la dictature anti-ouvrière sous le « régime des Colonels », Selon l’historien Daniel Beauvois, ce « vocable désigne les cabinets formés, de 1935 à 1939, par ceux se présentent comme les héritiers spirituels et politiques de Pilsudski ». Parmi eux, Jozef Beck, le très germanophile ministre des Affaires étrangères.

[2Le site : odrodzenie.fr.