Lors des travaux du 38e congrès, en 2018. (Capture d'écran/DR)
39e congrès du PCF

Comment rassembler autour d’un projet progressiste ?

par Philippe Allienne
Publié le 6 janvier 2023 à 12:09

Les communistes ont jusqu’à ce 8 janvier pour déposer un texte alternatif au projet de base commune adopté début décembre par la Conseil national. Une proposition intitulée « Urgence de communisme » a été présentée le 20 décembre. Elle a recueilli environ 500 signatures. Il lui en faut 300 issues de 33 départements au moins.

Parmi les premiers signataires : Pierre Laurent, le président du Conseil national, Marie-Georges Buffet, Elsa Faucillon, Nathalie Simonet, Marie-Pierre Vieux, ex-députée européenne... En exergue, le texte cite Louis Aragon : « Quand les blés sont sous la grêle / Fou qui fait le délicat / Fou qui songe à ses querelles / Au cœur d’un commun combat. » Planète en danger, capitalisme mis en question, mobilisation de la jeunesse... « Ce contexte exceptionnel doit faire de notre congrès un moment d’analyse renouvelée et d’innovation communiste. Car une chose est certaine : les convulsions du monde sont telles que la situation ne restera pas en l’état. Communistes, nous voulons être actrices et acteurs de ce moment historique » lit-on en page 9 du texte alternatif. Partisan du texte initial, adopté par le Conseil national, Erwan Jacquemart (fédération du Nord) réagit. « Le raisonnement est assez similaire dans les deux textes », analyse-t-il. L’un et l’autre s’accordent en effet pour constater que le monde dominé par le capitalisme globalisé et financiarisé n’est pas à la hauteur des enjeux actuels. Pourquoi alors ce texte alternatif ? Pour Erwan Jacquemart, c’est avant tout une affaire de stratégie. Elle porte autour du rassemblement. « Tout le monde s’accorde pour se rassembler. C’est la démarche qui est différente. » Ainsi, les travaux du 38e congrès concluaient qu’il faut aller vers les électeurs désabusés, celles et ceux qui ne se déplacent plus. « Nous voulons renouer avec des millions de gens qui ont intérêt à voter à gauche. Mais comment reconstruire une dynamique populaire ? L’idée, c’est de rechercher des convergences entre le mouvement social et les forces politiques. Il nous faut mettre en avant nos propositions et notre originalité. Nous sommes capables d’aller chercher des gens parce que nous ne disons pas la même chose que les autres. » L’autre démarche, portée par les signataires du texte alternatif « Urgence de communisme » consiste plutôt à rassembler tout de suite. Cela ramène à la logique, née après l’élection présidentielle, des trois blocs. Le bloc de gauche, qui a voté pour Mélenchon, a recueilli 20 % des voix. De là apparaît cette logique : en se mettant tous ensemble, en développant la Nupes, on va amplifier le rassemblement. Cette logique se heurte à la première qui consiste à aller chercher les personnes déconnectées de la politique et que l’on amènerait ensuite dans le rassemblement. « La notion de bloc, explique Erwan Jacquemart, revient à considérer que tous les gens au sein d’un bloc ont tous les mêmes attentes. C’est oublier que l’électorat est très hétérogène et très changeant. La théorie des blocs n’est pas d’actualité. » Pour les tenants du texte alternatif, s’il y avait eu un candidat unique à la présidentielle (c’est-à-dire si Fabien Roussel ne s’était pas présenté), on aurait pu déplacer les électeurs de ce candidat (le bloc de gauche) vers les élections législatives qui auraient alors pu être remportées. Cela part de l’analyse qu’il existe déjà un embryon de rassemblement d’idées. « Je considère que le paysage politique est aujourd’hui tellement éclaté qu’il faut arriver à reconstituer des électorats en allant chercher les personnes qui, au fond, partagent nos idées. Il nous revient aussi de développer ces idées. » Le communisme, c’est le partage et la redistribution des richesses, c’est la défense du financement du système de protection sociale. C’est la question du travail. « Un exemple, défend encore Erwan Jacquemart, il y a les gens de gauche qui défendent la notion de revenu universel. Et puis, il y a ceux, au Parti communiste, qui défendent un travail avec un salaire qui permet, grâce aux cotisations, de construire une protection sociale et un système qui sécurise tout un parcours de vie. En développant de tels concepts, marxistes, on peut reconstituer un électorat. C’est de la sorte que l’on peut reconstituer un rassemblement gagnant. »