Stéphane Sirot traite dans son dernier opus de l'avenir du syndicalisme au XXIe siècle
. © Jacques Kmieciak
Mouvement social du 29 septembre

Des leçons à tirer

Publié le 7 octobre 2022 à 13:02

Professeur d’histoire à l’université de Cergy-Pontoise, spécialiste du syndicalisme, Stéphane Sirot livre son analyse de la journée de mobilisation du 29 septembre dernier.

200 points de rassemblements. 250 000 manifestants partout en France, selon la CGT. Satisfaite de cette démonstration de force, la centrale syndicale propose «  de poursuivre et renforcer ces mobilisations, sans attendre et dans l’unité la plus large ». Il s’agit d’un « succès relatif », modère Stéphane Sirot. Il rappelle volontiers que ces journées de 24 heures « sont de moins en moins suivies parce qu’elles ne s’inscrivent pas dans une dynamique d’actions comme ce fut le cas lors du mouvement contre la réforme des retraites de l’hiver 2019 ». Regrettant que «  le bilan de ce constat n’ait jamais été établi  », l’universitaire pointe tout autant du doigt « des journées sans lendemain, qui n’encouragent pas les travailleurs, privés de perspectives, à sacrifier une journée de salaire dans un contexte de hausse du coût de la vie. Lorsqu’on discute avec eux, ces réflexions émergent ».

Des luttes locales

Pour Stéphane Sirot, il semble « aussi difficile de mobiliser sur une simple revendication d’augmentation des salaires dans la mesure où cette question se traite entreprise par entreprise. Porter l’exigence d’une échelle mobile des salaires, de leur indexation sur la hausse des prix, aurait certainement été plus unifiante. Cette journée a aussi été annoncée longtemps à l’avance, cet été. Il y a un côté mécanique forcément démobilisateur ». Et pourtant, depuis le début de l’année, « les conflits se multiplient sur un plan local pour les salaires notamment, même au sein de sociétés comme Sephora dont les employés ne font pas grève habituellement, mais à l’échelle nationale, aucune cristallisation des mécontentements ne s’opère »

Résurgence des « Gilets jaunes » ?

L’appel lancé par la France insoumise à la « grande marche contre la vie chère » aurait contribué à semer la confusion. Pourtant ni les partis politiques, ni les syndicats « n’ont intérêt à attiser des jeux d’influence délétères. Les bisbilles internes renvoient l’image d’un désordre ». La résurgence d’un mouvement type « Gilets jaunes  » pourrait-il alors être d’actualité ? « C’est une possibilité. À partir du moment où le corps social s’estime en situation de réagir pour survivre, il réagit quoi qu’il arrive. C’est ce que craint d’ailleurs le gouvernement qui n’a pas la mémoire courte. Il a peur d’être confronté à un mouvement incontrôlable, hors norme, transgressif, sans interlocuteur désigné pour trouver un compromis », souligne Stéphane Sirot. Ce n’est pas pour rien « que toutes les petites mesures (chèques énergie, aides à l’acquisition de carburant, etc.) s’adressent avant tout aux catégories défavorisées qui sont sorties sur les ronds-points, il y a trois-quatre ans ».

  • À lire : Quel syndicalisme en France au XXIe siècle ?, de Stéphane Sirot. Tarif : 7 euros (frais de port compris). Rens. : stephsirot chez gmail.com