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Fabien Roussel

« Je n’ai jamais laissé entendre quoi que ce soit quant à une éventuelle participation à un gouvernement d’union nationale ! »

Publié le 1er juillet 2022 à 13:09

Emballement. C’est le mot qui convient quand on écoute et quand on lit les commentaires sur le secrétaire national du PCF et député du Nord. Il livre sa mise au point pour les lectrices et lecteurs de Liberté Hebdo.

  • Au lendemain de votre entrevue avec le président Macron, les commentaires sont allés bon train sur vos déclarations laissant entendre que vous étiez prêts à participer à un gouvernement d’union nationale. Vous avez été mal compris ou vos propos ont été mal interprétés, voire manipulés ? Il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre ou que ceux qui veulent me faire de mauvais procès. Je n’ai jamais laissé entendre quoi que ce soit. J’ai clairement dit à Emmanuel Macron, lors de ma rencontre avec lui, et je l’ai confirmé tout de suite aux médias qui m’ont interrogé à ce sujet, qu’il était hors de question pour nous de participer à un gouvernement d’union nationale tellement le rejet de sa politique est grand. J’ai dit aussi que le Parti communiste français avait vocation à participer à des gouvernements. C’est dans son histoire. Nous voulons toujours faire en sorte de nous mettre au service du monde du travail, du monde ouvrier. À chaque fois que nous avons participé à un gouvernement, c’était dans cet esprit. Mais nous n’avons jamais participé à des gouvernements qui ont desservi la classe ouvrière. Aujourd’hui, nous voyons bien que le gouvernement actuel et le président de la République ne remettent pas en cause leur politique. Ils vont peut-être l’amender à la marge mais ils vont rester exclusivement au service des plus riches. Donc je confirme ce que j’ai dit au président il y a maintenant une semaine [mardi 21 juin - ndlr] : il n’est pas à l’ordre du jour des communistes de participer à quelque gouvernement d’union nationale que ce soit, car le gouvernement n’envisage pas d’ajourner sa réforme des retraites, n’envisage pas de mieux redistribuer les richesses et n’envisage pas d’augmenter fortement les salaires et les retraites.
  • Sur les retraites précisément, si Macron fait un recul sur l’âge de départ, que faites-vous ? Nous allons tout faire pour que le gouvernement bouge, nous voulons peser de toute notre force pour que le gouvernement prenne les meilleures mesures pour les Français, pour leur pouvoir d’achat et des mesures de progrès social comme la réforme des retraites à 60 ans. Nous ferons tout dans ce sens-là, nous ferons des proposions au gouvernement, à l’Assemblée nationale et au Sénat, et il reviendra aux députés de la majorité de voter ou non nos propositions. Je préfère inverser la vapeur. Plutôt que d’avoir à dire si nous participerions ou pas à un gouvernement ou si nous sommes prêts à travailler ou pas avec la majorité, je renvoie la balle à Macron et à ses députés : êtes-vous, vous, prêts à voter nos propositions pour les salariés ?
  • D’après plusieurs médias, vous bouderiez la Nupes ? Vrai ou faux ? Je suis plutôt quelqu’un de bonne humeur, d’optimiste et de constructif. Je souhaite que l’alliance des forces de gauche, qui était une alliance électorale et qui a permis de gagner beaucoup de députés, fasse pleinement l’analyse de ce que nous avons réussi à faire pour en garder le meilleur, mais qu’elle fasse l’analyse aussi, et sans tabou, de ce qui n’a pas marché et des raisons pour lesquelles il y a eu autant d’abstentionnistes. Pourquoi n’avons-nous n’avons pas réussi à convaincre davantage d’électeurs, pourquoi n’avons-nous pas su empêcher autant d’électeurs de voter pour les candidats du Rassemblement national ? Donc je souhaite être le plus constructif et positif possible. Mais il faut pour cela accepter que l’on puisse en débattre et que l’on puisse formuler des critiques.
  • Comment envisagez-vous les prochains mois sur les bancs de l’Assemblée nationale, avec la Nupes ? Les parlementaires communistes, au Sénat et à l’Assemblée nationale, seront force de proposition pour arracher le plus de victoires possibles pour les Français, pour arracher le plus d’argent possible pour leur pouvoir d’achat. Nous continuerons de porter des propositions que nous avons portées avec les autres forces de gauche pendant les législatives et nous porterons aussi nos propres propositions qui font l’originalité du PCF.
  • Avez-vous un pronostic sur une prochaine dissolution du gouvernement, à six mois ou un an ?  Je n’envisage pas aujourd’hui qu’il y ait une dissolution alors que les Français viennent de voter. Ils ont exprimé un vote qui est majoritairement un vote de rejet du président de la République, Emmanuel Macron. Pour notre part, nous ne sommes pas dans un esprit de blocage et d’opposition systématique mais plutôt dans celui de nous battre et d’obtenir le plus d’avancées possibles.
  • Un commentaire sur les résultats de votre circonscription, la 20e du Nord, aux législatives ? Ma circonscription fait partie des 14 circonscriptions de France métropolitaine où le RN a fait ses meilleurs résultats, où Marine Le Pen a fait plus de 60 % au second tour de la présidentielle. Sur ces 14 circonscriptions, seules quatre n’ont pas basculé, dont elle de Jean-Marc Tellier (la 3e du Pas-de-Calais) qui l’a gagnée, et la mienne. Autant dire que le combat fut extrêmement difficile, que la victoire n’est jamais acquise et qu’elle nécessite un immense travail. C’est aussi pour cela que je souhaite que l’alliance des forces de gauche soit la plus efficace possible car si elle nous a permis de l’emporter chez Jean-Marc Tellier et dans la 20e du Nord, ce ne fut pas le cas chez Alain Bruneel [dans la 16e circonscription du Nord - ndlr]. Or, entre autres raisons de son échec, il dit avoir été pénalisé par des propos qui ont joué un rôle de repoussoir.
  • Les propos de Jean-Luc Mélenchon sur « la police qui tue » ? Voilà. Eh bien, de cela par exemple, il faut être capable de parler entre nous sereinement.
Propos recueillis par Philippe ALLIENNE