Dominique Watrin animera des réunions dans le Pas-de-Calais. DR
Bataille des retraites

La réaction de Dominique Watrin

Publié le 13 janvier 2023 à 15:46

Sénateur de 2011 à 2018, membre de la commission des affaires sociales, Dominique Watrin maîtrise ce sujet complexe sur le bout des doigts. C’est lui qui animera la plupart des réunions publiques programmées dans le Pas-de-Calais par le PCF.

  • Quel regard portez-vous sur le projet gouvernemental ? Cette contre-réforme est un marqueur de ce quinquennat. Il s’agit d’un recul social. Elle est à mettre en relation avec celle de l’assurance chômage avec toujours cette idée de travailler plus pour gagner moins. Ici, deux projets de société s’affrontent. Soit on considère la retraite comme une voie de garage, soit telle une opportunité pour un nouveau projet de vie. Le curseur de l’âge de départ change en fonction. De surcroît, le projet du gouvernement n’a aucune justification économique comme l’atteste le Conseil d’orientation des retraites (COR). Le système des retraites a été excédentaire ces deux dernières années. Un déficit est envisagé pour 2030, mais il sera limité dans le temps. Et puis, les 10 à 13 milliards de déficit annoncé sont à mettre en relation avec les 328 milliards de dépenses annuelles. C’est cacahuète. Rien ne justifie donc sa précipitation, même si le système est bien sûr perfectible et le PCF a fait des propositions en ce sens.
  • Les annonces, ce mardi, d’Élisabeth Borne ne vous ont donc pas rassurés ? Pas du tout. Le recul de l’âge de la retraite à 64 ans (au lieu des 65 un temps envisagé) ne rend pas le projet moins grave ou violent dans la mesure où l’augmentation de la durée de cotisation fera tout autant de dégâts. De surcroît, sa réforme est brutale et s’attaque quasiment à tous les Français. Dès septembre, elle va toucher ceux (la génération 1961) qui s’apprêtaient à partir. Ils devront cotiser trois mois de plus. C’est du jamais vu. La réforme s’applique, certes progressivement, mais tout de suite et en un temps record. On va ainsi passer aux 43 ans de cotisations dès 2027 au lieu de 2035 comme il était malheureusement prévu par la loi Touraine.
  • Le dispositif autour des carrières longues ne vous satisfait guère davantage ? Non dans la mesure où ceux qui font déjà l’objet de « carrières longues » vont devoir travailler encore plus, hormis ceux qui ont commencé avant 16 ans. Ces derniers pourront partir à 58 ans comme… aujourd’hui.
  • Un mot sur la prise en compte de la pénibilité ? Macron réintroduit deux facteurs (charges lourdes et posture pénibles) à considérer dans le compte pénibilité institué en 2014 sous Hollande. Mais il oublie de rappeler qu’en 2017, il en avait supprimé quatre dont deux concernant les vibrations mécaniques et les agents chimiques dangereux. Ce n’est pas rien. Si on se base sur 2014, il s’agit d’un recul ! Et au final, les travailleurs exposés travailleront plus longtemps ; la ligne d’arrivée pour le calcul des départs anticipés reculant de deux ans comme l’a rappelé Philippe Martinez de la CGT. Et puis, tout ça reste flou car le gouvernement renvoie à des négociations par branches…
  • Quid de la pension minimale de 1 200 euros brut ? Cette mesure s’appliquera aux carrières à taux plein et à temps plein. Les femmes (caissières, aides à domicile, etc.) souvent victimes de temps partiels imposés seront notamment pénalisées. Attention de ne pas tomber dans le piège du gouvernement. Beaucoup seront exclus de ce dispositif, même si certains en bénéficieront, nous ne le nions pas.
Propos recueillis par Jacques KMIECIAK