Cerner avec précision le nombre de pratiquants et celui des poissons prélevés. Telle serait l’ambition de l’UE. Dans un courrier adressé à Hervé Berville, secrétaire d’État en charge de la Mer, Cathy Apourceau a relayé l’émotion des pêcheurs. « Autour des consultations organisées en prévision de la "Politique commune de la pêche’’ qui doit être adoptée en 2023 pour quatre ans, la mise en place d’un permis payant pour la pêche de loisir en mer est de plus en plus évoquée », s’inquiète la sénatrice communiste qui dénonce « une atteinte grave à une liberté fondamentale ».
Une pratique populaire
« Demain, pour cueillir trois pintes de moules, attraper deux crabes ou pêcher 500 grammes de crevettes, faudra-t-il montrer patte blanche sous la forme d’un permis ... payant ? » s’indigne le PCF du Boulonnais. Stéphane Honvault, de Marquise, pêche à la plage depuis l’enfance. Il ne décolère pas d’autant que « la pêche en mer est déjà très réglementée et qu’il y a de moins en moins d’endroits où elle peut s’exercer ». Un permis payant « rendrait cette activité élitaire », selon lui. « Il s’agit en effet d’une pratique populaire. Elle permet à certains de faire manger la famille, d’améliorer l’ordinaire », constate Jacques Rivenez, le vice-président des Pêcheurs de la Warenne, un club de surfcasting (lancer dans la vague) basé à Saint-Etienne-au-Mont. Et Brigitte Passebosc, la maire (PCF) de cette commune du Boulonnais, de se demander la raison pour laquelle ce projet « refait surface ? N’y-a-t-il pas d’autres chats à fouetter en ce moment ? ».
Souffrance animale ?
Favorable à l’instauration de ce permis, le député Éric Coquerel (LFI) le légitime par la lutte contre la souffrance animale. Il revendique ainsi que ce sésame s’accompagne en amont d’une formation ponctuée par un examen car « les pêcheurs de loisir sont amenés à réaliser de nombreux actes techniques : choix du matériel, retrait des hameçons, manipulation et mise à mort des poissons... Chaque lacune a de graves conséquences pour les poissons ». Pour Stéphane Honvault, « la souffrance animale est mise à toutes les sauces. C’est du grand n’importe quoi. Ira-t-on jusqu’à interdire la cueillette des champignons sous prétexte qu’ils souffriraient eux aussi ? Quant aux clubs et aux détaillants, ils sensibilisent déjà largement au respect des poissons. Le savoir-faire se transmet aussi de père en fils. Et je préfère voir les gamins pêcher que jouer sur leur console ou trainer en ville ». De surcroît, les quantités pêchées sont minimes ! Contrairement aux tenants de la pêche industrielle, « nous ne portons pas atteinte à la biodiversité », insiste Stéphane Honvault. Et Brigitte Passebosc de se dire « prête à mobiliser largement » si la menace se précisait.