Brexit

Les paradis fiscaux ont de beaux jours devant eux !

Publié le 31 décembre 2020 à 10:54 Mise à jour le 30 décembre 2020

C’est sur le dossier pêche que l’accord sur le Brexit a polarisé les esprits ces dernières semaines. Finalement signé à l’arraché, une dizaine de jours avant l’entrée en vigueur de la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne, l’accord sur la pêche donne aux armements européens un délai de cinq ans, jusqu’en juin 2026, pour baisser leurs captures dans les eaux britannique de 25 % en valeur. Mais le Brexit ne se limite pas à un accord sur la pêche.

Les pêcheurs français devront réduire leurs volumes de pêche de 8 à 10 %. Ils se sentent soulagés après les passes d’armes de ces dernière semaines mais, dans les Hauts-de-France, le président de Région, Xavier Bertrand, alerte sur la clause de revoyure prévue en 2026 et réclame un plan de soutien. Mais hors ce dossier chaud, qu’en est-il de la finance ? Elle a été bizarrement écartée des conversations, s’étonne le Parti communiste français. Pourtant, explique-t-il dans un communiqué, « le projet des financiers anglo-saxons d’avoir un super paradis fiscal aux portes de l’Union européenne demeure ! ». Pour le secrétaire national du PCF Fabien Roussel, Boris Johnson n’a pas hésité à annoncer dans un quotidien anglais son intention de multiplier les ports francs, à taxation ultra-légère, pour concurrencer les ports européens. Depuis plusieurs années, la City et plusieurs capitales européennes se livrent une concurrence sans merci pour attirer les capitaux en proposant les meilleurs schémas d’optimisation fiscale. À ce jeu, la City était déjà très bien placée : elle est la première place financière mondiale sur le marché des capitaux. 7 000 milliards de dollars y sont échangés chaque jour ! Et la place londonienne réalise 60 % de toutes les opérations liées aux marchés européens des capitaux. Mais c’est surtout un paradis fiscal bien connu des fonds d’investissements et de toutes les grandes multinationales qui y délocalisent leurs bénéfices, afin d’éviter de payer les impôts là où ils sont installés. La City sert en effet de passerelle pour transférer ces bénéfices dans les îles britanniques telles que les Caïmans ou encore Jersey, situées à quelques encablures des côtes françaises. Ces juridictions britanniques sont des paradis fiscaux notoirement connus. Les îles britanniques accueillent 6 000 milliards d’actifs en leur proposant un taux d’imposition moyen sur les bénéfices à 1,73 %. Avec ou sans accord, le Brexit a ouvert une guerre entre paradis fiscaux, entre la City et les pays de l’Union à taux d’imposition quasi nul tels que le Luxembourg, l’Irlande ou les Pays-Bas. Ainsi, il semble bien que plus rien n’empêchera la place de Londres d’adopter ses propres règles fiscales, même si les milieux financiers doivent pour cela ouvrir une succursale au sein de l’Union européenne. Dans cette guerre, et à l’heure de la lutte contre la pandémie, les grands perdants seront les peuples : la fraude et l’optimisation fiscales coûtent 80 à 100 milliards d’euros au budget de la France, tous les ans, et près de 1 000 milliards d’euros aux pays de l’Union européenne. Sur les 1 500 pages de l’accord de Brexit, il aurait pu y avoir quelques propositions pour attraper des gros poissons de la finance qui privent les pays de l’Union européenne de plusieurs centaines de milliards d’euros d’impôts par an. Il est urgent d’établir des règles fiscales identiques dans tous les pays de l’Union européenne et de mettre des filets de sécurité à la circulation des bénéfices réalisés dans nos pays. L’imposition à la source des bénéfices de ces multinationales reste à ce jour la meilleure solution, comme le PCF l’avait formulé dans une proposition de loi déposée en 2019. Une occasion de régler ces pratiques malhonnêtes vient d’être manquée dans les négociations autour du Brexit. L’exigence des peuples pour une vraie justice fiscale en Europe n’a pourtant jamais été aussi forte. Et Fabien Roussel de conclure : « L’argent existe et il coule même à flots pour une minorité qui fait tout pour échapper aux impôts. Ayons le courage de s’attaquer à ce fléau. C’est comme cela que nous pourrons répondre aux besoins humains, financer nos services publics et relever le défi écologique. »