La CGT craint à nouveau une liquidation du service des urgences de l’hôpital de Wattrelos. Elle l’a exprimé lors d’un premier rassemblement vendredi 14 février. Le matin même, le CHSCT (une structure que la loi Travail n’a pas supprimée dans le secteur de la santé) avait informé de la situation et des risques qui planent actuellement. Cette communication est d’autant importante que la direction de l’hôpital et l’Agence régionale de la santé (ARS) invitent le personnel à demeurer discret.
Vers un projet drastique
Alors que le service de communication de l’ARS Hauts-de-France nous assure, sans autre commentaire, « qu’il n’y a pas de projet de fermeture de service dans cet établissement », la CGT déroule de nombreuses raisons d’inquiétude. Le service des urgences compte actuellement 15 agents dont deux médecins titulaires, des infirmières et des aides-soignantes. À ce chiffre s’ajoute le personnel ambulancier et administratif. L’ARS demande à la direction et aux médecins de l’hôpital de lui remettre un projet en réduisant le coût moyen du passage (pour un patient) de 160 à 100 euros. Pour y parvenir, elle propose de réduire les plages d’ouvertures en faisant le deuil de la plage nocturne.
Un effort au niveau du personnel (agents administratifs, aide-soignant·e·s, infirmièr·e·s) est aussi demandé. « Les urgences , analyse Yannick Sobaniak, délégué CGT, constituent la porte d’entrée de l’hôpital. Or, le gouvernement, via l’ARS, veut réduire le nombre de lits de service sur le territoire (en l’occurrence les Hauts-de- France). Sur le versant Nord-Est (Roubaix- Tourcoing-Wattrelos), les prévisions portent sur la suppression de 40 lits. Or, à Wattrelos, nous disposons de 30 lits. Si l’on ferme ce service, cela veut dire que l’on ferme le flux d’entrées vers la médecine. Par conséquent, l’hôpital de Wattrelos ne serait plus un hôpital général et serait réduit à un centre de rééducation et de gériatrie. »
Un long combat
Pour bien comprendre la situation actuelle, et ce que la CGT nomme la « troisième tentative de liquider les urgences » , il faut remonter à 2007 quand le centre hospitalier perd son autorisation pour les urgences. L’établissement signe alors une convention avec le centre hospitalier de Roubaix de manière à obtenir des médecins urgentistes. Mais six ans plus tard, en 2013, l’hôpital de Roubaix subit une grosse crise des médecins urgentistes (arrêts de travail, congés maternité, etc.). Il a besoin des médecins qui exercent aux urgences de Wattrelos.
Coup de Trafalgar
« En juillet 2013, explique Yannick Sobaniak , l’ARS nous annonce la fin des urgences durant la nuit et la fin totale à partir d’octobre de la même année. » La mobilisation du personnel mais aussi de la population (Wattrelos compte 40 000 habitants mais l’hôpital rayonne sur une population de 60 000 personnes) va permettre d’infléchir la décision. Une pétition locale réunit 20 000 signatures et une délégation est reçue par la ministre de la Santé de l’époque, Marisol Touraine. En octobre, le service des urgences ne ferme pas et, le mois suivant, le directeur de l’ARS, Jean- Yves Grall, est porteur d’un courrier rassurant de la ministre. Plusieurs engagements sont pris : signature d’une nouvelle convention avec Roubaix, recherche d’un équilibre financier entre les deux établissements, présence médicale sur le site de Wattrelos 24 h sur 24.
Mais en 2016 et 2017, l’établissement subit un coup de Trafalgar. Il perd les médecins urgentistes de Roubaix. Il s’avère que si les urgences fonctionnent effectivement, l’ARS ne fournit aucun document officiel autorisant leur financement ! L’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) ne peut donc plus payer. Il faut savoir que le coût d’un passage aux urgences s’élève en moyenne à 160 euros. Les urgences de Wattrelos enregistrent actuellement 12 000 passages par an (14 000 en moyenne en 2017), soit un coût de 1,9 million d’euros. La dotation annuelle de l’ARS (entre 500 000 et 800 000 euros par an) est loin de suffire. Résultat, le déficit se creuse pour atteindre 4 millions d’euros.
Fin 2017, l’ARS estime trop élevé le coût des urgences wattrelosiennes et demande une réduction des plages horaires. En 2018, le service est fermé de minuit à 6 h contre la promesse d’un nouveau financement. « Mais là encore, il n’y a pas d’écrit » reproche la CGT. Paradoxalement, si le service ne peut plus être considéré comme un « service d’urgence » au sens où il ferme la nuit, il ne peut refuser les personnes qui se présentent après minuit.
Aujourd’hui, le personnel réclame tout simplement les financements nécessaires pour exercer ses missions. Le 14 mars, on notait deux absents au rassemblement : le maire de Wattrelos et président du conseil de surveillance du centre hospitalier, Dominique Baert, et la députée Catherine Ozon.
Voici ce que nous écrit ce lecteur ce que nous écrit ce lecteur après une opération au centre hospitalier régional de Lille et une rééducation au centre hospitalier de Wattrelos. Édifiant.
Je me suis fait opérer fin novembre pour une prothèse totale du genou au CHR de Lille. À mon arrivée, très bien reçu par le personnel, je fais connaissance avec mon voisin de chambre. Lui sera opéré du genou droit, moi du gauche. Un aide-soignant s’adresse à nous. Nous croyons qu’il blague quand il nous dit que, si nous sommes frileux, « va falloir amener une couverture de chez vous, nous n’en avons plus ».
Mais ce n’est pas une blague... Avant l’opération, il faut se doucher deux fois : la veille au soir et le matin même... Surprise là aussi : il n’y a plus d’eau chaude. Nous faisons donc notre toilette avec des bols d’eau chauffée dans le micro-onde du personnel. L’opération se passe bien et me voilà en rééducation à Wattrelos, où je suis très bien accueilli là aussi et me retrouve avec le même voisin de chambrée qu’au CHR. Chambre agréable, cabinet de toilette avec douche à l’italienne.
« À l’italienne » mais obligation de racler l’eau qui, sinon, s’écoule dans la chambre, engendrant un risque de glissade et de chute. Pas pratique le gant de toilette d’une main et le rac l’eau de l’autre. Le dernier jour, la télé tombe en panne. Elle ne sera pas réparée, le budget étant épuisé. Plus de télé et plus de lit non plus, celui-ci étant pris pour dépanner un autre service. Aujourd’hui, tout va bien pour moi. Un grand merci au personnel, auquel je souhaite bon courage et... de ne pas travailler jusqu’à 70 ans.
Philippe I.