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Rentrée grelottante à l’université

Qui va payer la facture ?

par Philippe Allienne
Publié le 23 septembre 2022 à 16:51

À Strasbourg, l’Université a annoncé un plan de cinq actions pour faire baisser le coût de la consommation énergétique. Parmi elles : la fermeture des locaux durant deux semaines supplémentaires cet hiver. À Lille, l’action va plutôt porter sur les postes administratifs. La CGT s’inquiète.

Dans la perspective de la hausse de la facture énergétique, la CGT Ferc Sup a demandé à la ministre de l’Enseignement et de la Recherche qui va payer le chauffage cet hiver ? La question a été posée lors du Comité technique ministériel du 8 septembre. La réponse de Sylvie Retailleau a été en substance : « bâtiments, chauffages, fluides : on va s’en occuper. Il y a des efforts de solidarité à faire dans notre ministère, comme dans tous les autres. Il ne faut pas que recruter soit incompatible avec se chauffer : on y travaille. » Concernant le besoin urgent de rénovation des établissements, « souvent dans des états lamentables et véritables passoires thermiques » souligne la CGT, : « Il y a un travail interministériel prévu, avec une planification par l’État pour améliorer les 15 à 20 millions de mètres carrés de l’ESR ». Pour le syndicat, ces réponses doivent apparaître dans les lignes budgétaires consacrées à l’Enseignement supérieur et la Recherche (ESR) du projet de loi de finances 2023. Faute de moyens (postes et locaux notamment), la rentrée 2022 s’annonce d’ores et déjà difficile. Selon les premières annonces, l’inflation (environ 6 % par an) ne sera que très partiellement compensée dans le futur budget. Dans ces conditions, comment payer la hausse des charges : énergie, chauffage, fluides, matériel… tout ce dont a besoin une université pour fonctionner ?

«  Nos employeurs, annonce la CGT Ferc Sup, ont déjà quelques brillantes idées  :

  • Baisser le thermostat, qu’importe si on gèle dans les bureaux, si on ne peut plus écrire à cause des doigts gourds…
  • Fermer des services et mettre leurs personnels en télétravail.
  • Renvoyer les étudiant·es et les enseignant·es chez eux, en instaurant l’enseignement à distance.
Et pourquoi ne pas envoyer les collègues ramasser du bois mort ou imposer 10 minutes de gymnastique à la pause pour se réchauffer ? »

La CGT rappelle que le télétravail ne peut se faire que sur la base du volontariat et que l’enseignement à distance ne saurait être un moyen de pallier les manques d’investissement de l’État. « Il est tout à fait inacceptable que l’État reporte ses propres charges d’employeur (chauffage, connexion, lumière, restauration, etc.) sur le personnel et les étudiants et étudiantes. » Elle demande depuis des années que l’État réinvestisse massivement dans le patrimoine de l’ESR et porte des projets d’améliorations de l’isolation thermique des bâtiments et de déploiement de solutions soutenables.

À l’université de Lille, l’intersyndicale CGT-FSU-Sud Éducation a lancé le 7 septembre une pétition qui a recueilli plus de 600 signatures à ce jour. Les titulaires et contractuels revendiquent, notamment, un financement de la part de l’État pour obtenir des moyens à la hauteur des missions confiées à l’université. Elle sera remise à la direction et au représentant de l’État lors du conseil d’administration du 6 octobre. Il faut attendre cette date pour en savoir plus sur les intentions de la direction sur la facture énergétique. Mais d’ores et déjà, les syndicats s’attendent à des suppressions de postes administratifs pour permettre de se chauffer. Cette économie porterait sur 45 postes en misant sur le non-remplacement de départs en retraite. De toute façon, souligne Thomas Alam, maître de conférence en sciences politiques et syndicaliste, « l’université n’est pas considérée comme prioritaire en cas de coupure d’électricité.  » Les présidents négocient avec RTE (le Réseau de transport d’électricité). Une coupure serait en effet très nuisible pour les sites expérimentaux, par exemple.