Spécial Habitat

Rénovation de l’habitat minier : encore de nombreuses questions

Publié le 5 novembre 2020 à 18:46 Mise à jour le 6 novembre 2020

CDC Habitat (ex-SNI) détient désormais 34 % du capital de la SA d’HLM Maisons & Cités(1). Elle a apporté 150 millions d’euros, valorisant ainsi le capital à 450 M€. Il s’agissait pour Maisons & Cités de financer son programme de réhabilitation thermique dans l’ex-bassin minier alors que la réforme des APL a sévèrement grevé son budget.

Premier bailleur social des Hauts-de- France et deuxième entreprise sociale pour l’habitat de France, Maison & Cités gère 64 000 logements répartis sur l’ex-bassin minier. L’arrivée de CDC Habitat, filiale de la Caisse des dépôts et consignations spécialisée dans la gestion du patrimoine immobilier public, permet ainsi de développer un très important plan de rénovation. Cette opération se déroule dans le cadre de l’« Engagement pour le renouveau du bassin minier » (ERBM), un plan lancé par le gouvernement Hollande.

L’une des mesures phares de l’ERBM réside dans le financement, à hauteur de 10 millions d’euros par an, d’un vaste plan de réhabilitation des cités minières qui se traduira par la rénovation de 22 000 logements sur dix ans. La priorité est mise sur 34 cités minières. Mais, relativise Raymond Frackowiak, secrétaire de la CGT chez mes mineurs du Nord-Pas-de-Calais, (Coordination régionale des syndicats des mineurs CGT), « Maisons et Cités dispose de 64 000 logements dont certains n’ont subi aucune rénovation ». Quid des 42 000 logements restants ?

42 000 logements en suspens

Plus généralement, il se montre peu optimiste et craint un danger pour le logement social. « Dans les discussions qui ont précédé l’entrée de CDC Habitat dans le capital de Maisons et Cités, explique-t-il, des rencontres se sont tenues avec le conseil d’administration d’Epinorpa et le directeur de l’ex-SNI, en Lorraine, qui nous a annoncé que le budget pour la rénovation du logement social va diminuer d’année en année, pour faire place à des financements privés. » Dans les faits, le gouvernement réduit le montant des aides au logement, pénalisant les ménages les plus modestes, en s’attaquant au 1 % logement, devenu « Action Logement ». « Il préconise de prélever sur le 1 % logement pour compenser le déficit budgétaire dû à la Covid. » Le financement d’Action Logement est assuré par une cotisation sociale assise sur un pourcentage de la masse salariale versée par l’employeur, appelée participation à l’effort de construction. Pour le secrétaire de la CGT, cela va conduire à une diminution de la construction de logements neufs.

La baisse des APL

Suite à la diminution de l’APL de 5 €, il a obligé les bailleurs à diminuer le montant des loyers, mesure qui a réduit les moyensde fonds propres des bailleurs. Résultat, dit-il, « Maisons et Cités a perdu en 2018, 28 millions d’euros de fonds propres ». Le gouvernement vient par ailleurs de modifier les bases de calcul de l’aide au logement. « 1,2 million de personnes vont connaître une diminution de l’APL et 600 000 personnes verront leur allocation supprimée. Les jeunes actifs ne bénéficieront plus de cette allocation qui était une aide à leur installation. 3,8 millions de ménages ont des difficultés à payer leurs factures. »

Suppression des tarifs réglementés

Concernant le programme de rénovation de logements sociaux, il rappelle que 500 millions d’euros sont débloqués pour l’année 2021-2022, en particulier pour l’amélioration de l’isolation. « C’est une bonne mesure, mais elle est insuffisante au regard des sept millions de logements mal isolés qui sont recensés. » Raymond Frackowiak évoque encore bien d’autres motifs d’inquiétude. Ainsi, « les tarifs réglementés vont être supprimés pour 2024. Les fournisseurs privés de gaz et d’électricité se frottent les mains, ils pourront s’entendre entre eux pour cesser la concurrence et augmenter le coût de l’énergie ».

S’agissant de la réhabilitation des logements Maisons et Cités, « la Région, le Département, les communautés d’agglomération vont mettre la main au portefeuille pour financer les travaux d’environnement du bailleur et du public. Ce sont donc les locataires qui financent par leur impôt ».Enfin, le syndicaliste rappelle que la réhabilitation du logement minier a débuté dans les années 70. Or, que va-t-il se passer pour les logements qui n’ont subi à ce jour aucune rénovation. « Seront-ils rénovés, ou vendus, ou rasés ? » « Nous ferons tout, conclut-il, pour que nos 14 000 ayants droit à titre gratuit bénéficient d’un logement rénové, adapté à leur état physique. »

LE RENOUVEAU DU BASSIN MINIER EN CHIFFRES

1 800 C’est le nombre de logements en cours de rénovation sur la période 2018-2020.

34 C’est le nombre de cités minières concernées par l’ERBM sur dix années.

200 M€

C’est le montant consacré au contrat ERBM par l’État, les agglomérations, le Département et la Région.

(1) Le groupe Maisons & Cités s’est constitué en 2002 avec la création de l’établissement public Epinorpa et le rachat de la SAS Soginorpa, société créée en 1986 par Charbonnages de France ayant en charge la gestion des logements miniers. L’acquisition d’une coopérative HLM, devenue depuis Maisons& Cités Accession, a ensuite permis d’engager une activité de construction et ainsi d’élargir l’offre de logements. L’établissement public Epinorpa est rattaché à la Région Hauts-de-France et il est l’actionnaire de référence de Maisons & Cités, SA d’HLM.