Rouen, les enquêtes commencent

Publié le 11 octobre 2019 à 16:51

La population reste inquiète malgré les discours rassurants des ministres et des experts. En plus de Lubrizol, Normandie Logisi tique, est désormais également impliquée. L’entreprise, qui stocke les produits de Lubrizol mais aussi d’autres clients, n’aurait jamais indiqué aux services de l’État la nature exacte des produits entreposés selon une note interne divulguée par Le Monde.

Dans Le Parisien cette semaine, le PDG monde de Lubrizol, Éric Schnurr s’est excusé pour « l’irritation qui résulte de la fumée de l’incendie ». Peut-être une forme de réponse au préfet de Seine-Maritime, Pierre-André Durand, qui réclamait à Lubrizol de faire cesser l’odeur persistante, et désagréable, qui stagne sur la ville de Rouen depuis l’incendie ? « Elles sont incommodantes, anxiogènes et déplaisantes pour toute la population » a-t-il déclaré dans un point presse. À croire qu’il cherche un ventilateur géant ou un gaz dévoreur d’odeurs qui effacerait l’affreux souvenir et balaierait d’un coup toute rémanence olfactive.

Le pollueur doit payer

Du côté des riverains, plus de 130 plaintes ont été déposées principalement pour « mise en danger de la vie d’autrui ». Une perquisition était en cours dans les locaux administratifs de Lubrizol jeudi 10 octobre. La recherche de la zone départ de l’incendie est en cours, la direction de Lubrizol insistant sur une origine extérieure. Après la fumée, le brouillard s’étend toujours. Les restrictions agricoles sont maintenues au moins jusqu’au 11 octobre dans une centaine de communes en Seine- Maritime et dans les Hauts-de-France.

Dans le Nord, le sous-préfet de Douai, Jacques Destouches, s’est rendu sur l’exploitation agricole de Monsieur et Madame Carré, seuls producteurs de lait de la commune concernés par les mesures de restriction.

En Seine-Maritime où la problématique est plus large, Sébastien Jumel, député PCF, a organisé une réunion publique le 9 octobre au foyer rural de Neuville-Ferrières en pays de Bray : « Je demande à l’État qu’il prenne dans la journée des mesures de réquisition pour assurer la collecte du lait non commercialisable et son stockage hors des exploitations pour les éleveurs qui le souhaitent. Les agriculteurs sont victimes de la crise, dit le ministre. Le soutien aux victimes n’attend pas. La réponse des pouvoirs publics aux difficultés concrètes, pratiques, financières des producteurs impactés par Lubrizol est à ce jour insuffisante ».

Sur la question immédiate de l’incendie de Rouen, c’est d’autant moins du goût de la CGT qui exige des pouvoirs publics de tout mettre en œuvre pour que Lubrizol paye la facture et « assume ainsi ses responsabilités » en prenant en charge « le nettoyage complet des zones polluées par des entreprises spécialisées », y compris le suivi des analyses. Ce qui passe aussi pour la CGT par un « recensement précis des travailleurs et populations exposés » et la mise en place d’un suivi médical spécifique, incluant une évaluation des cancers.

Le principe du pollueur-payeur est bien au cœur des démarches pendant que les différents responsables tentent de noyer le grand public dans des circonvolutions juridiques, au risque que nous perdions de vue le principal : exiger de l’État la mise en œuvre de moyens de contrôle, et de pression, des pouvoirs publics permettant de protéger l’humain et l’environnement plutôt que les intérêts du capital et les bénéfices.