Attentat de Nice

Y a-t-il une stratégie terroriste ?

par Philippe Allienne
Publié le 30 octobre 2020 à 15:17

Après l’assassinat du professeur d’histoire-géographie Samuel Paty, le 16 octobre à Conflans-Sainte-Honorine, le triple attentat de Nice et les événements qui l’entourent, ce jeudi 29 octobre, interrogent.

Après l’attaque au couteau qui a causé la mort de trois personnes et blessé plusieurs autres ce jeudi 29 octobre à Nice, le plan vigipirate a été porté au niveau « urgence attentat  » sur l’ensemble du territoire. Les fait se sont déroulés dans la matinée, vers 9 h, au sein de la basilique Notre-Dame de l’Assomption, à Nice (Alpes-Maritimes). Un homme a égorgé une paroissienne et le sacristain que l’on a retrouvés pratiquement décapités. Une troisième victime, une femme blessée à l’arme blanche, est parvenue à trouver refuge dans un bar voisin mais est décédée quelques instants après. L’assaillant, un Tunisien de 21 ans arrivé récemment en France, a été maîtrisé par la police. Blessé, il criait « Allah Akbar ! ». Le parquet antiterroriste a été saisi de l’enquête.

Accumulation

Un peu plus tard le même jour, à Lyon, un homme a été interpellé après avoir brandi un couteau dans une station de tramway. Toujours jeudi matin, à Djeddah cette fois, en Arabie saoudite, un Saoudien a été arrêté après avoir agressé un garde du consulat français. À Avignon, un homme armé d’un couteau a essayé d’attaquer des policiers dans la rue après s’en être pris à un commerçant maghrébin. C’était vraisemblablement un militant d’extrême droite. Il a été tué. Le président Macron a lancé un message de fermeté et a appelé les Français à l’unité et « à ne rien céder à l’esprit de division ». Parmi les dirigeants qui, comme Angela Merkel ou le britannique Boris Johnson, ont témoigné leur solidarité, on trouve le président turc Erdoğan. On peut toutefois s’interroger sur les conséquences des relations très tendues entre la France et la Turquie et sur les mots d’oiseau envoyés par Erdoğan à son homologue français. Le moins que l’on puisse dire est que l’accumulation des faits terroristes est troublante et préoccupante. Dans le cas de l’assassinat de Samuel Paty, il était difficile de parler de loup solitaire, s’agissant de l’agresseur. La victime était personnellement ciblée pour avoir montré des caricatures représentant le prophète Mahomet à ses élèves. Un parent d’élève avait fait circuler des informations diffamatoires sur la toile. Elles avaient été reçues bien au-delà de nos frontières. Un prédicateur, qui n’avait rien à voir ni avec l’école, ni avec la famille, s’en est mêlé. On connaît la suite tragique (notre édition précédente).

Le choix des personnes ciblées

Dans le cas du triple assassinat de Nice, nous avons affaire à une, voire deux personnes (un complice était semble-t-il recherché par la police jeudi après-midi) qui se sont attaquées à des anonymes sont la particularité était d’être chrétiens. On tendrait plutôt, ici, à faire le rapprochement avec l’attentat commis par deux islamistes qui, le 26 juillet 2016, avaient égorgé le Père Jacques Hamel, prêtre auxiliaire de Saint-Étienne-du-Rouvray (Seine- Maritime), au sein même de son église. L’enquête en dira plus sur l’individu de Lyon. Peut-on, dans ces derniers cas, parler de loups solitaires, c’est-à-dire de personnes qui n’ont pas besoin d’une organisation forte pour commettre des attentats ? Sont-ce des esprits faibles échauffés par le climat international ou des individus manipulés ? Il est difficile cependant de croire qu’ils agissent vraiment seuls. Tout bras armé est souvent téléguidé de près ou de loin. Les vraies questions qui se posent ce jeudi soir portent sur le choix des cibles par les agresseurs. Là encore, les enquêtes permettront d’y voir plus clair sur l’existence ou non d’une réelle stratégie. Auquel cas, nous aurons raison d’avoir peur.

(Photo : © Mr No)