Monsieur le Président, De nombreuses voix s’élèvent pour que le plus grand nombre de nos concitoyens et peuples du monde aient accès au vaccin, le plus rapidement possible. Il s’agit là du seul moyen de sauver des vies, retrouver une existence normale et empêcher l’arrivée de nouveaux variants. Dans cette lutte mondiale, l’industrie pharmaceutique, qui a réussi l’exploit de trouver en peu de temps plusieurs vaccins, refuse aujourd’hui de lever les brevets qui protègent leur découverte, et empêche leur production partout où cela est possible. Leur but, et ils l’affirment dorénavant sans honte, est de réaliser des marges toujours plus importantes, scandaleuses, sur le dos des finances publiques et de notre Sécurité sociale. De nombreux pays du monde n’y ont toujours pas accès pour cette raison. Dans un document délivré par des journalistes d’investigation américains, un script relatant les discussions entre les dirigeants de Pfizer et leurs investisseurs Morgan Stanley, Goldman Sachs, UBS et consorts, Albert Bourla, PDG de Pfizer, et son directeur financier, Frank D’Amelio, rassurent leur auditoire en leur garantissant « des marges importantes », « des opportunités économiques » et « des prix normaux pour un vaccin pouvant aller à 150 et 175 dollars la dose » ! C’est un véritable hold-up de notre Sécurité sociale, réalisé, comme tous les braquages, dans la plus grande discrétion, en toute opacité ! Pfizer déclare faire un geste en vendant la dose à 19 dollars actuellement, mais il annonce en même temps réaliser une marge de 25 % à 30 % sur ce vaccin ! Alors que le coût de production d’une dose de Pfizer serait de l’ordre de 2 à 3 dollars, le Premier ministre bulgare a annoncé que la Commission européenne négociait actuellement l’achat de 900 millions de doses supplémentaires au prix de 19 euros la dose, après l’avoir achetée 12 euros en novembre mais finalement payée 15 euros ! Qu’en est-il vraiment ? Pourquoi une telle opacité ? Nous parlons de milliards d’euros d’argent public ! Qu’en est-il véritablement du coût de la vaccination pour nos finances publiques, pour la Sécurité sociale ? La représentation nationale comme les Français ont le droit de savoir. Soyez transparent avec nous. Ce sont nos cotisations qui financent cette campagne de vaccination. Ce sont aussi les milliards d’euros d’argent public investis auprès de ces laboratoires, sous différentes formes (crédit impôt recherche, CICE, subvention directe en lien avec la pandémie...) qui ont permis la découverte de ces vaccins. Nous en sommes donc, nous aussi, en partie propriétaires. Enfin, vous le savez, ces industriels jouent avec la terrible loi de l’offre et de la demande et profitent donc de la pénurie de vaccins pour faire monter les prix. C’est donc bien un enjeu important, déterminant, d’obtenir la levée des brevets pour pouvoir les produire librement, rapidement, en échange d’une indemnisation. De nombreux anciens chefs d’État, prix Nobel de la Paix, chercheurs, médecins, citoyens, vous demandent d’intervenir rapidement auprès de l’Organisation mondiale du Commerce pour enclencher l’article 31 du Code du commerce international afin d’obtenir la levée de ces brevets. Je suis à votre disposition pour en discuter avec vous et créer les conditions, avec d’autres, dans la diversité de nos opinions, de nos responsabilités, pour que tout le pays, dans l’union la plus large, mène ce combat à l’échelle internationale. C’est aussi le rôle de la France, membre permanent du Conseil de sécurité, d’être à l’avant-poste de la lutte pour faire du vaccin un bien commun, un bien public au service de l’humanité. Dans l’attente de votre réponse, je vous prie de recevoir, Monsieur le Président de la République, l’assurance de ma haute considération.
Fabien Roussel, député du Nord, secrétaire national du PCF Paris, le 19 avril 2021