Réflexion sur la crise sanitaire

« État d’âme » (référence à la chanson de Jean Ferrat)

Par Pierre BEHAGUE*

par PIERRE BEHAGUE
Publié le 10 avril 2020 à 10:39

Et y sont où

les marchés financiers - fonds d’investissements -, les investisseurs institutionnels - banques et assurances -, les traders et même les rentiers jamais satisfaits de la « rentabilité » de leur spéculation ?

Et y sont où

la commission européenne et la BCE obnubilées par la barrière des « 3 % de déficit » ?

Et y sont où

le MEDEF, ses oligarques et leurs supplétifs pleurnichant leur leitmotiv « baisse des charges....baisse des charges » tout en explosant leurs profits, captant un maximum d’argent public par le CICE et toutes les exonérations et « optimisations » fiscales, ce qui ne les gênent pas pour délocaliser, dégraisser sans vergogne les effectifs et même carrément fermer des sites, par exemple Luxfer en décembre 2018 à Gerzat (Puy-de-Dôme) qui produit l’oxygène médical et l’oxygène pour les pompiers : actionnaire principal Blackrock ! 134 salariés au chômage. En 2018 les bénéfices affichaient une hausse de 55 %, aujourd’hui, l’État, premier client de Luxfer, doit se fournir en Grande Bretagne et... en Chine !

Et y sont où

les éditorialistes, les experts, les journaliste larbins du système ultra libéral qui hurlent en boucle « baisse des dépenses publiques, baisse des dépenses publiques... » sur tous les médias écrits et audiovisuels sans se rendre compte qu’ils sont sur le même bateau ?

Et y sont où

les fonctionnaires zélés des ARS qui gèrent « avec leur calculette  », comme des comptables froids, la santé publique en sabrant à qui mieux mieux dans le fonctionnement de toutes les composantes de celle-ci, moyens humains, moyens matériels, recherche ?

Et y sont où

les soi-disant prix Nobel d’économie grands prêtres du système capitaliste psalmodiant comme un mantra : « le marché, le marché... » ? Ce sont les idéologues de ces politiques aujourd’hui fatales à la santé et aux restes des services publics demain.

Et y sont où

les « premiers de cordée », disparus corps et biens, planqués sur leurs yachts ou dans des résidences bien protégées dispensés d’ISF par Macron ?

Et y sont où

les « indépendants » et poujadistes de tout poil ahanant : « moins d’État moins d’État » et qui crachent sur les « privilégiés » des services publics ? Abandonnés par leurs maîtres ils appellent aujourd’hui à la solidarité nationale.

Et y sont où

Macron et ses ministres pour qui « le social ça coûte un pognon de dingue » et qui n’ont cessé, comme leurs prédécesseurs, de fermer les lits d’hôpital, de diminuer les effectifs des personnels de santé, de sacrifier la recherche publique mais « en même temps » gazer et matraquer ces mêmes personnels qui depuis longtemps ne font que donner l’alerte en réclament des moyens en bras et en matériels ?

22 millions en 2017 plus une rallonge de 3 millions en 2019 ont été budgétés pour les lacrymos et les munitions des LBD pour les masques protecteurs... pour les respirateurs et l’oxygène faudra attendre.

Et y sont où

les militaires régulièrement gavés de pognon par tous les gouvernements qui se succèdent depuis des décennies pour se payer les joujoux les plus chers : force de frappe nucléaire, Rafales, missiles, sous-marins nucléaires, porte-avions qui se chiffrent en dizaines de milliards par an et qui ne servent à rien dans cette guerre ? Ils ne sont capables de mettre à la disposition des « civils » que 30 lits. Pour mémoire 110 000 lits d’hôpital ont été supprimés ces 20 dernières années dont 15 000 sous Hollande et 7 500 les deux premières années de Macron.

Comme dans toutes les guerres, ils envoient « la chair à canon » : médecins, soignants, bénévoles, humanitaires, « ceux qui ne sont rien », les «  premiers de corvée », se faire massacrer sans arme, sans protection en versant des larmes de crocodiles sur leur sort, profitant au passage pour prendre des mesures d’urgences restreignant les libertés individuelles.

Après avoir tout vendu, de la protection sociale jusqu’aux aux services publics de l’énergie, des transports, de la poste... ils osent déclarer : « Surtout il faut sauver l’économie la santé viendra après ! » Telle a été et telle est toujours leur sinistre politique. Privilégier leur classe... c’est dans leur nature.

Pas de merci pour tous ces criminels ils devront payer.

Il faudra s’en souvenir quand cette guerre sera terminée car elle se terminera comme toutes les guerres, mais certainement pas grâce à eux et à quels prix ?

Leurs responsabilités devront être établies et eux-mêmes être jugés. Ils ne devront pas rester impunis, ils devront payer.

*Co-fondateur de Radio Campus Lille.