Le mercredi 6 mai dernier, nous avons écouté le président Macron parler art et culture. Nous n’allons pas ici entrer dans les détails de tout ce qui a été dit, le mieux étant de lire et/ou d’écouter la position de la Coordination des InterLuttants 59-62, celle du Synavi (Syndicat national des arts vivants, ndlr), celle du SFA/CGT, celle de Samuel Churin ou encore celle de Jean- Marc Adolphe (très faciles d’accès sur les réseaux sociaux).
Cela étant, nous tenons à dire quelques mots sur les propos tenus concernant l’art et la culture à l’école ! En effet, ces propos nous ont profondément choqués. Mais que croit-il donc avoir inventé, le président ? Cela fait des années et des années que nombre de compagnies comme la nôtre travaillent, grâce à divers dispositifs, à faire en sorte que des élèves (écoles élémentaires, collèges, lycées) puissent découvrir de façon très concrète l’art dramatique.
Cela fait des années que les tutelles (État, via les Drac, Régions via les fonds PEPS, certains conseils départementaux dont celui du Pas- de-Calais, très investi dans la culture, certaines villes), cela fait des années que certaines associations (nous pensons notamment aux Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active ou à la Ligue de l’enseignement et de l’éducation populaire qui, dans le Pas-de-Calais toujours, propose un parcours très élaboré : Arts de la scène au collège, nous pensons aussi à l’Office central de la coopération à l’école), cela fait des années que certains lieux culturels s’investissent énormément (et en termes d’énergie et en termes de choix budgétaires) dans ce domaine de l’action artistique et culturelle.
Monsieur le Président, n’avez-vous pas un ministre (qui lui-même doit avoir normalement un chef de cabinet plus un staff rompu aux problématiques du spectacle vivant) ou un conseiller « affaires culturelles » capables de vous faire un historique clair et synthétique de tout ce qui a été entrepris dans ce domaine depuis au moins « les années Lang » ? Mais c’est incroyable ! C’est faire insulte à beaucoup d’entre nous. C’est aussi faire insulte à nombre de fonctionnaires des administrations culturelles qui se sont battu·es corps et âme pour créer des espaces d’échange et de travail entre professionnel·les, enseignant·es et élèves (cela concerne les ministères de la Culture, de l’Éducation nationale et de la Ville, mais aussi les institutions régionales et départementales).
Combien de compagnies sont investies dans les options (lourdes et facultatives) en lycées ? Combien de compagnies encadrent des ateliers en collège ou en école élémentaire ? Combien de compagnies sont allées présenter des formes légères ou des impromptus dans des établissements scolaires ? Oui, les propos du président sont incroyables !
Mais que croit-il donc avoir inventé, le président ?
Incroyable encore cette expression : « prêts à donner une ou deux après-midi par semaine », c’est-à-dire « donner de NOTRE temps » ? Merci de préciser votre pensée complexe, Président, vous sous-entendez « bénévolat » ? Alors que toutes ces heures doivent être non seulement rémunérées mais encore comptabilisées non au régime général mais au régime spécifique « intermittents du spectacle ». Quant aux colonies de vacances, à l’utopie concrète, au tigre à enfourcher et au jambon/fromage de Robinson... sans commentaire ! Deux remarques Monsieur le Président : faites-vous mieux conseiller (ou écoutez davantage ceux qui connaissent vraiment le secteur artistique et culturel) et arrêtez de faire croire à tous nos concitoyens que vous avez inventé l’eau tiède !
*Comédien et metteur en scène, compagnie Avec vue sur la mer basée à Arras. Ses dernières créations : Discours de la servitude volontaire adapté d’Étienne de la Boétie et Bande de Belges en forme d’hommage aux surréalistes belges.