Capture d'écran/France 2
Après le passage de Fabien Roussel sur France 2

La campagne présidentielle prend un nouveau tournant

Publié le 17 décembre 2021 à 10:36

Porte-parole du candidat communiste à l’élection présidentielle, Guillaume Roubaud-Quashie décrit une campagne en pleine ascension. Après le JT de France 2, il reste à transformer l’essai en renforçant les idées maîtresses.

Le passage de Fabien Roussel au journal de France 2, ce mardi 14 décembre, a fait un tabac. Pensez-vous que cela peut constituer un tournant dans la campagne ? Aujourd’hui, tout le monde ne sait pas toujours ce que l’on est, ce que l’on porte, ce que l’on veut, au Parti communiste. Donc, vu le nombre de personnes que l’on a touchées, c’est important. Oui, cette émission peut être un support pour un tournant, à condition que le parti, ses militants, ses élus amplifient la dynamique forte portée par notre candidat.

Où en est cette dynamique aujourd’hui ? Je constate une montée en puissance progressive. Il ne faut pas cacher les difficultés. Elles sont pour une part liées à la pandémie et à ce que cela a changé dans la vie publique et le militantisme, l’action, les rassemblements, etc. Et puis il y a le sentiment que l’élection est encore loin. Cependant, il faut regarder les choses et considérer ce qui a été fait. Je pense à la caravane des jours heureux qui a construit des événements dans les régions côtières, cet été. Il y a eu toutes ces rencontres des jours heureux un peu partout en France pour commencer à sillonner le pays et pour développer un certain nombre de positions importantes que l’on doit porter ; il s’agit de questions qui pour l’instant n’occupent pas beaucoup le devant de la scène médiatique. Celle-ci reste au contraire centrée sur cette thématique identitaire, l’obsession Zemmour. Mais nous avons de notre côté essayé d’avancer pour aborder les questions qui préoccupent vraiment les Français.

Par exemple ? Nous avons parlé ruralité, agriculture, industrie, santé, recherche, éducation, etc. Et puis n’oublions pas un élément de départ : l’annonce de la candidature de Fabien Roussel après le vote des camarades. Les priorités ont été données tout de suite, à commencer par la jeunesse et le pacte de la jeunesse proposé par notre candidat. De nombreuses graines ont d’ores et déjà été semées. Il faut ajouter, parmi les étapes de la campagne, le meeting de la place Stalingrad [le 21 novembre à Paris, ndlr] qui a été très important en termes d’enjeux fondamentaux autour de l’emploi, des salaires et des pensions. Je n’oublie pas bien sûr la Fête de l’Humanité, à la rentrée. Voilà autant d’éléments, autant d’étapes qui ont permis de construire. Maintenant, on approche 2022, alors il faut continuer cette montée en puissance pour arriver à quelque chose d’ampleur, qui mette en dynamique l’ensemble des communistes qui sont massivement mobilisés derrière la candidature de Fabien Roussel. Mais il faut aussi toucher au-delà. Parce qu’en fait, c’est toute l’ambition du comité des jours heureux. Tout ce que nous portons là est en phase avec le projet communiste et en même temps on voit bien que tout ce que répète Fabien Roussel peut rassembler très largement. Je pense à ce qu’il dit autour de son projet de gauche sociale, démocratique et laïque. Quand on écoute les autres candidats, on peut se dire que l’on devrait pouvoir rassembler très largement, au-delà de nos rangs.

Vous pensez à quoi ? Prenons par exemple la question de la prostitution. Le candidat écologiste est très ambigu. Sur la retraite à 60 ans, on voit bien qu’Anne Hidalgo, et même Jean-Luc Mélenchon, ne sont pas très nets. Nous, avec une position féministe très claire et une position sur la retraite, très claire, nous avons un écho très large. Notre ambition pour le premier trimestre 2022 est de réussir à mobiliser les communistes mais, au-delà, à mobiliser tous ceux qui dans le pays ont intérêt à ce que notre candidat fasse le score le plus important possible.

Mais dès qu’il a démarré sa campagne, Fabien Roussel avait deux cailloux dans les chaussures. Le premier, c’est sa participation à cette manifestation avec les policiers et les réactions négatives de communistes, jeunes ou moins jeunes. Croyez-vous que la polémique est derrière ? C’est vrai que cette manifestation a fait l’objet de beaucoup d’échos médiatiques. Que faut-il en retenir ? D’abord, un fonctionnaire de police venait d’être tué et il y avait un appel très large à une mobilisation de manière assez naturelle pour dire que nous ne pensons pas normal que dans notre pays un fonctionnaire trouve la mort dans l’exercice de sa profession. Donc, Fabien Roussel a décidé de participer à la manifestation pour porter ce message. Au contraire, la droite fait toujours beaucoup de mousse mais dans la réalité, elle diminue le nombre de fonctionnaires de police. Fabien Roussel y est allé pour porter notre position qui est de défendre une police républicaine qui défende l’ensemble des citoyens et qui en ait les moyens. Une police de proximité, bien formée, plus nombreuse. La tranquillité publique n’est pas un thème de droite. La candidature de Fabien Roussel est celle qui défend les intérêts du plus grand nombre et donc les intérêts des milieux populaires.

Fabien Roussel a-t-il évolué au fil de cette campagne, a-t-il beaucoup appris sur la manière dont il faut la mener ? Ce qui est certain, c’est que sur l’orientation de la campagne, il a donné la priorité à la jeunesse. Il est stable là-dessus et sur ce que nous portons. C’est un homme qui écoute. Après, le comité de campagne s’est beaucoup structuré. Il y a une montée en puissance là aussi avec un espace qu’on appelle Fablab, qui est notre QG et qui a été inauguré il y a quelques semaines. Fabien Roussel dispose donc d’un comité de campagne plus organisé, plus structuré autour de lui. Ce comité n’existait pas au début de la campagne, il a été lancé à la rentrée.

Le second caillou c’est l’appel à l’union que des communistes appellent de leurs vœux. Le dernier en date émane de Marie-George Buffet. C’est simple, des décisions ont été prises par les communistes. Il y a eu un vote pour savoir ce que l’on faisait au vu de la situation qui était la nôtre. Le vote ne souffre pas de contestation. Il est honnête, franc et massif : présenter un candidat à l’élection présidentielle et soutenir une démarche pour un pacte d’engagement commun, notamment dans la perspective des élections législatives dont nous voulons revaloriser le rôle. C’est bien cela que nous voulons rappeler contre une logique bonapartiste ou césariste qui existe dans notre pays comme elle existe dans d’autres pays, ou chez d’autres.

Des militants sont inquiets et de bonne foi… Il existe une inquiétude légitime dans le parti : va-t-on arriver à échapper à une extrême droite en embuscade ? La seule manière d’y répondre, c’est de prendre la question au sérieux. Peut-on ou pas prendre le risque d’une extrême droite au pouvoir et comment la fait-on reculer ? À cette question, il y a une réponse très politicienne qui est de ne pas se concentrer sur les préoccupations des gens. Une réponse qui consiste à aligner des logos. Se rend-on compte de ce que cela veut dire et du gouffre qui peut exister entre des millions de personnes tentées par le vote de l’extrême droite et l’idée que, face à cela, la solution serait d’additionner des gens qui pour une partie apparaissent profondément discrédités. Même si c’est pavé de bonnes intentions, l’échec est garanti. Personne ne peut penser sérieusement qu’on fera reculer le RN en mariant des gens qui portent pour certains des réponses aux préoccupations populaires et pour d’autres pas du tout. Soyons sérieux. Pourra-t-on répondre aux préoccupations populaires sans discuter des traités européens ? Peut-on avancer en n’ayant pas l’ambition d’avoir une retraite à 60 ans ? En n’ayant pas l’intention d’aller affronter le capital ? Voilà. Pour nous communistes, la réponse politicienne n’est pas la plus adaptée pour répondre à ce défi.

Propos recueillis par Philippe ALLIENNE