Au terme d’une campagne contrariée par la pandémie de Covid, le président sortant Xavier Bertrand (divers droite) remporte sans surprise l’élection régionale (52,4 % des voix, soit la majorité absolue) et sera réélu à la tête du conseil régional des Hauts-de-France. Mais ce scrutin est aussi marqué par une abstention très forte (66,9 %), un net recul de l’extrême droite, l’absence de LREM et le retour dans l’hémicycle de 28 élus de la liste « Pour le Climat, Pour l’emploi » portée par la Verte Karima Delli. Une fois les résultats connus, Xavier Bertrand s’est exprimé publiquement depuis Saint-Quentin. Se félicitant d’avoir fait reculer le Rassemblement national, il a embrayé sur ses ambitions nationales : « Ce résultat me donne la force d’aller à la rencontre de tous les Français. » C’est dit, rendez-vous est pris pour l’élection présidentielle de l’an prochain. Comme si les préoccupations pour la Région étaient déjà devenues secondaires pour le candidat déclaré dans la course à l’Élysée. Même chose ou presque du côté du candidat du RN, Sébastien Chenu, qui, reconnaissant son échec (avec 25,6 % des voix, le RN perd 22 sièges) porte lui aussi son regard vers 2022. « Ce n’était pas notre élection. Rendez-vous à la présidentielle. » De quoi conforter les très nombreux abstentionnistes. De son côté, Karima Delli, seule tête de liste à porter un regard ambitieux sur l’avenir de la région, s’est félicitée du « retour de la gauche et des écologistes au conseil régional ». « Nous serons, a-t-elle assuré, une opposition ferme et constructive avec une nouvelle manière de faire qui associera les associations et les citoyens. »
Optimisme et détermination
La nouvelle assemblée de 170 conseillers devait être officiellement installée ce jeudi. 110 élus de droite (divers droite, LR, UDI, Modem, divers centre), 32 élus d’extrême droite (RN, Cnip, Avenir français) et 28 élus EELV et gauche se répartiront dans l’hémicycle. Ce dernier groupe, qui revient à la Région après six ans d’absence, compte neuf socialistes, neuf Verts, six membres LFI, trois communistes, un Génération.s et une divers gauche. Sollicitée par notre rédaction, Karima Delli n’a pas souhaité répondre à nos questions avant l’installation du conseil et, donc, sur la façon dont vont s’organiser et travailler les élus de sa liste. Jeudi matin, les trois élus communistes (sur les 24 que présentait la liste « Pour le climat, pour l’emploi »), Marie-Ange Layer (qui portait la liste dans l’Aisne), Héloïse Dhalluin (Nord) et Bernard Baude, le maire de Méricourt (dans le Pas-de-Calais) affichaient clairement leur optimisme et leur détermination. « Nous avons fait pièce au RN et nous serons une voix d’opposition claire face à la droite et à Xavier Bertrand », affirme Bernard Baude pour qui cette élection sonne comme un retour (il était conseiller régional dans la mandature de Daniel Percheron qui s’est achevée en 2015). Venus au siège de Région, à Lille, pour prendre leurs marques (remise des badges et du matériel…), ils ne savaient pas encore quelles commissions ils allaient intégrer. Ce vendredi, après l’élection du président, seules les commissions Finances, Développement économique et Appels d’offres) seront installées. Il faudra attendre la réunion du 20 juillet pour les autres qui seront décidées par le président du conseil. En attendant, se réjouissent-ils, « nous tenons à remercier les électeurs et les militants qui étaient très présents sur le terrain. » « Dans l’Aisne, souligne Marie-Ange Layer, ce n’était pas joué d’avance. » Un regret : l’absence de Loïc Pen, le médecin urgentiste qui se présentait dans le Nord et qui, à une poignée de voix, aurait pu être lui aussi élu. Il aurait été d’un grand secours dans les débats sur la santé, un dossier que les communistes mettent dans leurs priorités. « Nous nous battrons contre les déserts médicaux », assure Bernard Baude. « On sait qu’il faut un CHU pour un million d’habitants. Il en faudrait donc six pour les Hauts-de-France qui comptent 6 millions d’habitants. Or, nous n’en disposons que de deux, à Lille et à Amiens. » On sait qu’un troisième va être construit à Lens, mais sous prétexte de modernité du futur établissement, on prévoit déjà de nouvelles fermetures de lits dans la droite ligne de la politique libérale du gouvernement. Enseignante dans un lycée de Château-Thierry, Marie-Ange Layer abonde. « J’ai vu certains de mes anciens élèves qui ont suivi des études de médecine à Amiens. Mais en l’absence de perspectives, ils partent ailleurs et quittent la région. »
Regard attentif sur l’emploi et les transports
Autre dossier essentiel aux yeux des élus : les transports. Durant le mandat précédent, Xavier Bertrand a fait voter l’ouverture à la concurrence pour les TER. Comme il garde une très forte majorité (même s’il perd six sièges), on voit mal comment revenir en arrière. Les chantiers n’en demeurent pas moins nombreux : gratuité pour les moins de 26 ans avec extension aux chômeurs et précaires, regard attentif sur le maintien du service public et, insiste Héloïse Dhalluin, « nous allons nous battre en faveur des transports propres et de la multimodalité ». Mais les trois élus communistes en sont convaincus, le dossier qui montera très rapidement en puissance, dès l’ouverture des travaux de la commission finance, sera celui de l’emploi. D’autant que son dispositif « Proch’emploi », lancé au début de son mandat dans le cadre de son projet « Notre région au travail » n’a pas tenu ses objectifs. Les chantiers sont nombreux, à commencer bien sûr par la défense des services publics. Le retour de la gauche ne relève pas du luxe.