Photo d'illustration/ Piqsels
Grand âge

Une compétence majeure du Département

par Philippe Allienne
Publié le 25 juin 2021 à 11:22

Le Département est un acteur incontournable pour l’accompagnement du grand âge. Il est chef de file de la politique en faveur des personnes âgées. C’est lui, par exemple, qui finance l’Aide personnalisée d’autonomie (APA) et donne l’habilitation aux établissements médicaux-sociaux.

La solution la plus classique, et sans doute la plus connue, pour la prise en charge des personnes âgés en perte d’autonomie est certainement le placement en maison de retraite médicalisée, c’est-à-dire en Ehpad. À lire ce qu’en dit un organisme comme Retraite Plus, spécialisé dans le conseil et l’orientation en maison de retraite, l’Ehpad est un endroit idéal. À condition de trouver le bon, car tous ne sont pas égaux en qualité de service. Voilà ce que l’on peut lire sur son site internet : « En plus d’un encadrement par un personnel formé et qualifié et d’un environnement adapté alliant confort et sécurité, les établissements d’accueil pour personnes âgées bénéficient aussi d’un contrôle rigoureux et sont régulièrement soumis à des plans de modernisation. Le quotidien en Ehpad a été pensé afin de répondre à l’ensemble de ces besoins.  » L’objectif est de permettre de « vivre une retraite sereine sans avoir à assumer les contraintes de la vie quotidienne ». Plus loin, nous apprenons que « selon les besoins de la personne âgée et son budget, il est possible de choisir une maison de retraite médicalisée disposant de prestations additionnelles. En fonction des établissements, les chambres sont équipées de balcons ou même d’un salon. Certains sont dotés de grands parcs fleuris. Dans d’autres, la restauration se veut variée et raffinée avec un chef cuisinier qui veille à la qualité des menus. Plusieurs établissements disposent d’un espace Snoezelen destiné à favoriser la stimulation multi sensorielle grâce à un éclairage tamisé avec des variations lumineuses, ainsi que la diffusion de musique douce et de parfums. D’autres proposent une salle de kinésithérapie ou d’ergothérapie ou encore un salon de coiffure et d’esthétique ».

Selon le budget de la personne âgée

Cette description est tellement idyllique qu’elle fait penser aux illusions que se faisaient les trois personnages du roman Les vieux de la vieille de René Fallet et du film qu’il a inspiré à Gilles Grangier en 1960. Certes, les choses ont radicalement changé depuis cette époque, mais les exercices de communication actuels ne peuvent masquer la réalité. On a vu, avec la crise sanitaire, combien les conditions de vie des grands seniors peuvent rapidement se détériorer. Mais en dehors des circonstances particulières liées au Covid, et même si l’on ne peut généraliser le propos, de nombreux témoignages font souvent part de traitements très en-deçà des besoins des résidents. Mais surtout, le mot qu’il faut retenir dans la communication de « Retraite Plus » est « budget ». « Selon les besoins de la personne âgée et son budget, il est possible, etc.  ». C’est bien là que le bât blesse. Le coût mensuel s’élève a minima entre 2 000 et 2 400 euros par mois. Difficile, voire impossible pour un ou une retraitée qui perçoit une pension qui tourne autour de 1 200 euros. D’autant que le niveau des retraites va encore diminuer. C’est là qu’interviennent les conseils départementaux, via l’Aide personnalisée d’autonomie (APA), qui est alors perçue par les Ehpad. Mais le reste à payer demeure souvent trop élevé pour les familles. Pour les revenus très faibles, les Départements versent également une Aide sociale à l’hébergement (ASH) qui permet précisément la prise en charge du reste à payer. Pour la percevoir, les Ehpad doivent être habilités. « Dans le Nord, explique Charles Beauchamp, conseiller départemental communiste, le Département a incité les Ehpad à ne pas demander le renouvellement de cette habilitation. Certains ont accepté pour éviter les problèmes financiers via une baisse de dotation. C’est une forme de chantage qu’ont dénoncée plusieurs directions d’Ehpad nordistes dès 2016. » D’autant que, faute de moyens suffisants, ces maisons de retraite manquent de personnel. En France, il faut compter sur 0,57 soignant pour un résident en Ehpad. C’est près de la moitié de ce qu’il existe en Europe du Nord. Actuellement, 22% de la population du département du Nord est âgée de 60 ans et plus. L’allongement de la durée de vie va accroître considérablement ce chiffre, et la part des plus de 75 ans, dans les 30 années à venir. Les besoins vont augmenter en conséquence. Il existe d’autres solutions que le placement en Ehpad comme la colocation intergénérationnelle ou les béguinages. Mais le nombre de personnes âgées en perte d’autonomie souhaitant rester au domicile est toujours plus croissant. Elles étaient 78 000 en 2015, elles seront bientôt 120 000.

Maintien à domicile

Le maintien à domicile suppose un plan d’aide financé par le Département après visite d’agents pour vérifier les besoins. Ce plan porte notamment sur le recours à du personnel accompagnant, l’entretien du domicile, le soutien aux aidants (les proches le plus souvent), de l’accueil temporaire, etc. « En 2020, précise Charles Beauchamp, le budget départemental pour les personnes âgées hors APA s’est élevé à 85,5 millions d’euros. Il faut y ajouter 246 millions d’euros pour l’APA. » Il reste cependant beaucoup à faire. Le personnel encadrant les personnes âgées, qui relève souvent du secteur associatif, n’est pas suffisamment rémunéré faute de soutien suffisant du Département. Concernant les Ehpad, un autre danger rôde, producteur de davantage d’inégalités : celui de la privatisation du secteur.

Les propositions de Nord en commun Dans le projet construit pour 2021-2026, les candidats « Nord en Commun » (rassemblement de la gauche sociale et écologique) font quatre propositions pour l’accompagnement des aînés :
  • Développer l’habitat inclusif avec les résidences autonomie.
  • Apporter une aide pour la rénovation des Ehpad et des résidences autonomie.
  • Affirmer notre soutien aux métiers du grand âge afin d’agir sur la hausse des effectifs, une transformation des modes de management, la prévention des risques professionnels, la montée des compétences à travers une politique de formation ambitieuse, etc.
  • Faciliter le quotidien du proche aidant en mettant en place une plateforme d’entraide avec un dispositif d’accompagnement, la création de haltes-répit et un soutien psychologique à travers une ligne téléphonique dédiée.