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Rassemblement national

Hénin-Beaumont : la vitrine et l’arrière-boutique

par DAVID NOEL
Publié le 22 avril 2022 à 11:38

Depuis 2014, la ville d’Hénin-Beaumont est présentée comme la vitrine du Rassemblement national (RN). Vainqueur dès le premier tour en 2014, Steeve Briois, secrétaire général du RN et suppléant de Marine Le Pen, s’est fait élire sur la promesse d’en finir avec la « mafia socialiste » et l’incompétence de la gauche. Réélu en 2020 avec 74 % des voix, Steeve Briois a fait en quelques années d’Hénin-Beaumont un bastion électoral du RN, ce qui a permis à Marine Le Pen de se faire élire députée de la circonscription en 2017 et au binôme Briois/Le Pen de remporter le canton aux départementales de 2021. La clé du succès du RN réside dans une gestion financière supposée « désidéologisée ». Le RN a surtout bénéficié durant le mandat Hollande du dispositif gouvernemental pour sortir à moindre frais des emprunts toxiques. Grâce à ces marges de manœuvres, Steeve Briois a pu à la fois baisser les taux de la taxe d’habitation et de la taxe foncière et investir dans des travaux visibles tels que la réfection des voiries et de la façade de la mairie, tout en relançant des festivités. Bruno Bilde, ex-adjoint de Steeve Briois élu député de Liévin en 2017, a la haute main sur la communication, qui passe par un magazine municipal de combat et la page Facebook de la ville. Depuis huit ans, les conseils municipaux sont le théâtre de vifs affrontements, le maire coupant la parole aux élus d’opposition hués par un public acquis au RN. Les tribunes du groupe majoritaire dans le magazine municipal sont d’une violence inédite et vilipendent chaque mois les élus d’opposition accusés d’être des « bobos, gauchistes, revanchards, hystériques, incompétents ». Dès le début de son mandat, Steeve Briois a placé les associations sous surveillance. Son premier acte a ainsi été d’expulser la Ligue des droits de l’homme de son local. Les associations patriotiques jugées hostiles au Front national (renommé RN en 2018, ndlr) ont été écartées du comité de coordination. À Hénin-Beaumont, d’ailleurs, la municipalité ne dépose jamais de gerbes de fleurs le 19 mars [1]. Les achats de livres à la médiathèque sont surveillés et le centre culturel associatif a été mis au pas. Sur un plan plus symbolique, une charte anti-migrants a été adoptée ainsi qu’un arrêté anti-mendicité visant les roms, annulé par le tribunal administratif (TA). La crèche de Noël installée en 2015 dans le hall de la mairie a également été annulée par le TA que j’avais saisi en tant qu’élu d’opposition (PCF). Une pluie de procès en diffamation s’est abattue sur les élus d’opposition - dont huit contre moi - et sur la presse, inondée de droits de réponse. L’ancien secrétaire de la CGT des territoriaux a été révoqué. Terrorisés, les employés municipaux qui n’ont pas pu muter parlent sous le manteau d’un climat de flicage et de répression. De nouveaux visages, tous venus du RN, sont apparus dans les services, notamment pour gérer le centre de vidéosurveillance. À Hénin-Beaumont, les méthodes de pression et d’intimidation instaurées par le RN vont de pair avec l’idéologie...

Notes :

[1Le 19 mars est la Journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.