Contre vents et marées, un film de Jean-Philippe Jacquemin

La Résistance en héritage

par JEAN-LOUIS BOUZIN
Publié le 18 novembre 2021 à 22:25

Une séance à guichets fermés (200 personnes) ! Rare en ces temps de confinements. C’était, mardi 9 novembre, au Fresnoy à Tourcoing. On y projetait Contre vents et marées de Jean-Philippe Jacquemin, un film-documentaire émouvant, éclairant, et on ne peut plus d’actualité.

Au soir de leur vie, quatre résistants racontent leur engagement de jeunesse contre l’occupant nazi et le régime de Pétain (qu’un aspirant candidat à l’Élysée voudrait réhabiliter...). Sur grand écran, Yvonne Abbas, Guy Béziade, Michel Defrance, Pierre Charret, le seul encore en vie aujourd’hui, parlent. Des images d’archives entrecoupent leurs témoignages. Ouvrière, apprenti, lycéens, ils ont entre 17 et 20 ans quand, dans une France vivant sous la botte, ils se rebellent. La Résistance... ils racontent ce que cela signifie : les risques, la désapprobation parfois de leurs proches, l’illégalité, l’obligation de tout abandonner du jour au lendemain, la misère, l’arrestation, la vie qui bascule, la torture, les copains fusillés, l’évasion, la déportation, et, pour ceux qui s’en sortiront, qui « resteront dans la beauté des choses », le retour à une vie plus jamais pareille. Et qui poussera ces quatre-là à prolonger leur lutte en témoignant sans cesse auprès des plus jeunes. Pas pour jouer les héros, mais pour les convaincre de ne jamais laisser banaliser les idées de haine, rétrogrades, racistes, stigmatisantes dont on ne mesure pas toujours les terribles conséquences qu’elles peuvent engendrer. Pour leur rappeler à ces jeunes que la Résistance visait à se libérer, certes, de l’envahisseur, mais portait aussi, avec le programme dit du Conseil national de la Résistance si bien nommé « Les jours heureux », un projet social visant à faire avancer la justice et l’égalité. Ce combat est-il aujourd’hui dépassé ? Dans une France vivant actuellement « un moment trumpiste » (dixit l’écrivain Pierre-Louis Basse), la Résistance nous parle encore. Ces quatre portraits, ces quatre tranches de vie d’autant plus fortes qu’elles sont racontées sobrement, sans emphase, avec des mots simples, nous montrent, comme dit Jean-Philippe Jacquemin, « qu’il y a de la ressource dans l’humain ». Jean-Philippe Jacquemin est lillois. Le sujet de la Résistance le travaille depuis longtemps. Sa grand-mère, que l’on voit à l’écran, lui en parlait souvent lorsqu’il était enfant. Mais le déclic est venu lors d’un débat à l’issue d’un film qu’il avait programmé avec des amis au cinéma L’Univers à Lille-Moulins (Walter, retour en Résistance, de Gilles Perret). Michel Defrance, Pierre Charret et Guy Béziade avaient été invités. Réflexe de cinéaste, Jean-Philippe Jacquemin les avait filmés. Et c’est en revoyant les images et en mesurant l’effet produit sur le public par ces témoignages vivants que l’idée lui était venue, comme une évidence, de leur consacrer un film.

À voir ce samedi 20 novembre à Lille (cinéma Métropole) et mardi 23 novembre à Steenvorde (salle des fêtes).

Contre vents et marées a reçu le soutien de la Région Hauts-de-France. Le soutien aussi, très actif, des « Amis de la résistance Anacr » qui avaient d’ailleurs efficacement battu le rappel au Fresnoy. Il a fallu à Jean-Philippe Jacquemin de la patience (plusieurs années) pour réaliser son film, et encore de la patience pour le voir projeté en salle, la programmation ayant été retardée de près de deux ans en raison de la situation sanitaire. Cette fois, l’affaire semble bien lancée. Après Paris. Tourcoing et Wasquehal la semaine dernière. Le Quesnoy, Berck, Mons-en-Montois cette semaine, et en attendant de passer probablement à Boulogne-sur-Mer en janvier prochain et dans bien d’autres endroits si possible, le film sera visible ce samedi 20 novembre à 13 heures au cinéma Métropole à Lille (entrée 4 euros), dans le cadre du festival de l’Acharnière, et à la salle des fêtes de Steenvoorde mardi 23 novembre à 19 heures. Ne le ratez pas.