Pourquoi le picard ?

par ERIC BOCQUET
Publié le 29 décembre 2021 à 16:48

Le picard a été officiellement inscrit comme langue régionale au Bulletin officiel de l’Éducation nationale, le 16 décembre 2021. Le 2 décembre, nous étions quelques sénateurs de la région à nous adresser au Premier ministre afin de nous étonner de cette absence. Depuis plusieurs années, l’Agence régionale pour la langue picarde était mobilisée pour cette cause, cette inscription change beaucoup de choses. En effet, le picard pourra désormais être enseigné dans nos écoles. Le picard est une des 75 langues de France reconnue par un rapport parlementaire remis au Premier ministre, en 1999. En Belgique, il est reconnu officiellement comme langue régionale par un décret de la Communauté française de 1990. Le picard est parlé depuis les confins de la Normandie jusqu’à Tournai, en Belgique, et dans notre région des Hauts-de-France (sauf dans le Dunkerquois, où la langue régionale historique est le flamand occidental, également inscrit désormais, bravo !). Le picard, le ch’ti ont parfois été considérés comme de simples patois, du français déformé, un accent régional, or il s’agit bien d’une langue en tant que telle ; elle a son lexique, sa syntaxe, ses tournures idiomatiques, dont certaines n’ont aucun équivalent en français. Vous vous souvenez peut-être des versions en picard de cet album de Tintin, Ches pinderlots de l’Castafiore, ou encore celui d’Astérix et Obélix Ch’villache copé in deux, vendu à plus de 100 000 exemplaires ! Tout le monde s’est ébahi de l’immense succès du film de Dany Boon Bienvenue chez les Ch’tis, pensez-vous que ce film aurait eu un tel succès sans le picard ? Il existe dans notre patrimoine culturel une littérature abondante, de Jules Mousseron, le père ed Cafougnette, à Léopold Simons, poète lillois, peintre, comédien… de nombreux artistes régionaux, nous en connaissons tous ; et puis Alexandre Desrousseaux, un autre poète lillois, auteur du « P’tit Quinquin », une chanson intime qui illustre aussi la vie des ouvrières du Nord au XIXe siècle. Ces sketches de Simons qu’un comédien du Nord interpréta des centaines de fois, Jean-Marie Denis, fondateur du café-théâtre Petrouchka, rue Royale à Lille. Il nous a quittés cette année, « Ch’est pour ti ch’billet, eune pinsée amiteuse et min milleu souv’nir ».