À Grande-Synthe

Les associations humanitaires s’alarment des conditions de vie des exilés

par Christophe FORESTIER
Publié le 5 février 2021 à 11:22

En dépit d’une circulaire interministérielle imposant l’accueil des exilés dans des conditions dignes, les actions ne suivent pas. Les associations humanitaires se battent avec leurs moyens pour venir en aide aux réfugiés.

Des conditions de vie inhumaines, les associations humanitaires du Dunkerquois en déplorent régulièrement, accompagnées d’un manque de solutions d’hébergement pour les exilés qui se trouvent à Grande-Synthe. Ce manque de structures était un leitmotiv aux interventions de mercredi 20 janvier au pied de la communauté urbaine de Dunkerque (voir notre article). De nombreuses associations se battent pour qu’une solution d’accueil soit trouvée pendant la période hivernale. Un courrier en ce sens a été adressé au préfet de région, aux élus de la communauté urbaine et au maire de Grande-Synthe le 12 janvier dernier.

400 personnes sans solution d’accueil

Sur place, dans les bois à proximité de la zone commerciale de Grande-Synthe, les conditions sont plus que sommaires. Les exilés n’ont qu’une toile de tente en guise d’abri, et des couvertures fournies par les associations. Solidarity Border estime à 400 le nombre de personnes sans solution d’accueil. Et cela, en dépit des demandes d’aide d’urgence auprès des administrations qui restent vaines d’après les associations qui disent ne trouver « aucune solution » auprès du 115, pourtant dédié à ces requêtes. Cette demande de structure d’accueil s’appuie en effet sur une circulaire interministérielle en date du 3 novembre 2020 concernant la prise en charge des populations précaires pendant la crise sanitaire. Il y est question « d’ouvrir autant de places d’accueil que nécessaire pour qu’une solution soit proposée à toute personne recensée par le Samu social et ainsi éviter la présence de gens à la rue ». Ouverture d’un gymnase communal approuvée par la mairie, à en croire les associations, mais soumise à autorisation des services de l’État. Accord refusé par la préfecture, suscitant l’émoi des humanitaires qui soulignent la différence de traitement des migrants entre le Dunkerquois et le Calaisis.

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« Nous manquons de tout. Nous n’avons pas de quoi soigner les migrants sur place », se lamente Akim Toualbia, président de Solidarity Border. Il tient à préciser que certains migrants sont présents sur la zone de longue date et auraient besoin d’un suivi psychologique. Chose que les bénévoles ne peuvent fournir. Ce collectif distribue du matériel de survie (tente et couvertures) aux réfugiés. « Nous agissons en priorité auprès des nouveaux arrivants au cours de nos maraudes nocturnes », précise-t-il.

Pas de trêve hivernale pour les exilés

Parmi les associations présentes au rassemblement sous les fenêtres de la CUD, les membres de Salam interviennent en offrant une aide alimentaire aux migrants et dénoncent le manque d’évolution dans ce dossier depuis de nombreuses années. Cette inaction de la part des services de l’État les révolte. Ils estiment en effet qu’un système d’aide aux déplacés devrait être mis en place. « Les migrations existeront encore à l’avenir », affirment-ils. Une des bénévoles de l’association ajoute qu’une structure dédiée devrait se trouver à proximité de Dunkerque, les migrants souhaitant à tout prix gagner l’Angleterre. Une solution d’hébergement aurait d’ailleurs un double avantage, selon Solidarity Border. Elle permettrait d’abord d’assurer un accueil décent pour les migrants (son président précisant que ces derniers n’ont souvent pas de linge de rechange, vivent et dorment dans des vêtements trempés). Mais ce local servirait également à mieux orienter cette population qui ne sait rien des possibilités légales de rapprochement familial, ni d’asile qu’offre la France. Les associations humanitaires font un triste bilan. Depuis le 1er novembre 2020, date du début de la trêve hivernale, ils ont secouru 652 hommes seuls, 101 familles et 95 femmes seules. Du côté de Solidarity Border, on estime que ces personnes sont en danger au vu des températures hivernales actuelles. Si la situation migratoire révolte de nombreux habitants, à l’instar de José Deswarte, militant au Nouveau parti anticapitaliste, qui estime scandaleux que « l’argent puisse franchir les frontières d’une simple pression sur un bouton alors que les êtres humains peuvent crever », la mairie de Grande-Synthe n’a de son côté pas souhaité répondre à nos sollicitations.

(Photo : © Christophe Forestier/2018)